La tradition bouddhiste tibétaine Karma Kamtsang

Le Bouddhisme tibétain

Les trois aspects des enseignements du Bouddha se sont perpétués au Tibet. Il n’y a pas véritablement de chose telle que le « bouddhisme tibétain », en ce sens que son contenu est principalement le Bouddhisme qui fleurissait en Inde entre le 8è et le 12è siècle ap. J.C., et qui s’est transposé au Tibet pendant ces siècles, au cours d’une grande vague d’activité alimentée à la fois par les maîtres bouddhistes tibétains et indiens (heureusement il en fut ainsi parce qu’il fut éradiqué dans son Inde natale au cours des siècles qui suivirent). Bien que les Tibétains firent un excellent travail de codification et de commentaires sur le Bouddhisme d’Inde, ils ajoutèrent peu à son contenu. Le Bouddhisme tibétain ne doit pas être considéré comme une sorte d’excroissance exotique de Bouddhisme, comme certains pourraient le croire, mais comme la crème du Bouddhisme, dans sa forme la plus complète, où que ce soit dans le monde. Dans ses nombreux enseignements, on trouve tout ce qui se retrouvé séparément ailleurs, comme le Théravada, le Zen, etc., ainsi que de nombreux enseignements qui ne restèrent tels quels qu’au Tibet.

Des trois sortes de Bouddhisme indien, la vajrayana (souvent appelé tantra également) n’a survécu sous une forme vivante et intégrale qu’au Tibet, bien qu’on en retrouve des traces sous une forme plus rare et hermétique, au Burma et au Japon. C’est le nec plus ultra du Bouddhisme, et les Tibétains l’ont préservé d’une manière extraordinaire. On dit qu’à peu près un homme sur quatre au Tibet était moine ou ermite. Un pourcentage un peu plus faible mais significatif, de la population féminine, était nonne. C’est par leur pratique de méditation répandue et assidue que la « transmission intérieure » de la véritable signification des enseignements du Bouddha, fut maintenue et s’épanouit au Tibet.

Au cours des siècles, différents courants majeurs du Bouddhisme sont arrivés au Tibet. Bien que l’analyse des érudits tibétains y distingue 8 courants, de nombreuses personnes aujourd’hui considèrent qu’il y a quatre écoles principales du Bouddhisme tibétain : Nyingma, Kagyu, Sakya et Gelug. Parmi celles-ci, la plus ancienne est le Nyingma, fondé lorsque le Bouddhisme s’implanta pour la première fois au Tibet au 8è siècle, et le plus récent est le Gelug, qui remonte environ au 14è siècle, dont la personnalité actuelle la plus connue est SS le Dalaï Lama.

La tradition Kagyu

Comme toutes les lignées bouddhistes authentiques, la tradition kagyu a des racines implantées fermement dans les enseignements du Bouddha. Le point central en est toujours identique et unique : comment émerger des fluctuations perpétuelles de hauts et de bas, de douleurs et de plaisirs éphémères de l’existence mondaine basée sur l’illusion, et comment trouver la joie permanente, ultime, qui est la vraie nature de l’existence ? Illusion et vérité, relatif et ultime.

Ce qui distingue le Kagyu des autres traditions est la manière par laquelle les enseignements du Bouddha sont formulés et par les techniques très puissantes de méditation qu’elle utilise afin de permettre l’expérimentation et la réalisation des enseignements du Bouddha. La clarté de la formulation et la vivacité de la technique fleurissent à travers une lignée directe et ininterrompue d’enseignements qui nous viennent du Bouddha. Ceci est explicité plus en détail dans la page sur la Kagyu et l’héritage spirituel de Tilopa, et dans la partie sur la signification du nom Kagyu.

La lignée Kagyu elle-même dérive directement du Bouddha à travers deux courants d’enseignement. Le contenu de ces deux courants, et le coeur véritable de la doctrine Kagyu est appelée mahamoudra :

  • le premier courant d’enseignements provient du Bouddha, sous la forme du Vajradhara, à travers une succession de maîtres indiens, dont Saraha et Nagarjuna, et qui se termine avec Maitripa dans l’Inde du 11è siècle. Le fait principal de cet aspect du mahamoudra est le travail de méditation directe sur l’esprit lui–même. Ces enseignements furent amenés au Tibet par le disciple de Maitripa, – le Tibétain, Marpa.
  • le second courant d’enseignements vint du Vajradhara à Tilopa, un mahasiddha bouddhiste extraordinaire, qui a assimilé et maîtrisé les enseignements de plus de 100 importants gourous de son époque. Il transmit la quintessence de son héritage au Mahapandita Naropa, un des plus grands érudits du bouddhisme, et un des 84 grands siddhas de l’Inde. Cette lignée du mahamoudra utilise de nombreuses techniques de visualisation et de yoga aux fins d’aider à la compréhension générale de la nature de la réalité. Le tibétain Marpa fut également le suzerain principal de cette transmission.

Les deux principaux courants du mahamoudra arrivèrent donc au Tibet de par l’incroyable puissance de volonté de Marpa, qui, dans sa recherche de compréhension, fit le dangereux voyage du Tibet à l’Inde par trois fois, et qui y passa plus de 20 ans sous l’autorité de Naropa, pour y absorber la quintessence des enseignements bouddhistes vajrayana de l’Inde.

Le principal disciple de Marpa fut Milarepa, une personne amène au bouddhisme par les événements dramatiques de sa propre vie. Milarepa allait devenir le yogi le plus célèbre du Tibet parce qu’il acheva son voyage vers l’illumination au cours d’une seule vie, et aussi par son empressement inégalé à méditer vêtu d’un fin drap de coton, dans des grottes situées très haut dans les montagnes neigeuses.

Les deux générations suivantes de patriarches Kagyu allaient réellement forger son avenir pour le millénaire suivant. Gampopa, le disciple de Milarepa intégra les profonds enseignements en la grande érudition et en la discipline monastique pure qu’il reçut et qu’il maîtrisait déjà, pour devenir un maître bouddhiste compétent dans tous les aspects de l’enseignement. Il engloba la perfection des trois yanas. La venue de Gampopa avait même été prévue et prédite par le Bouddha Sakyamuni, dans le Samdhiraja Sutra. Alors que Milarepa atteint l’illumination en une seule vie, Gampopa est perçu comme quelqu’un qui serait resté pendant des périodes cosmiques innombrables au 10è niveau de bodhisattva, afin d’aider un Bouddha après l’autre à apporter leurs enseignements au monde.

Le chapitre sur Gampopa dans l’édition (anglaise – NDT) des « 100.000 chants de Milarepa » vous donnera plus de détails en une vue intéressante des relations entre Milarepa et Gampopa.

Il y a quatre lignées Kagyu majeures et 8 lignées mineures qui se déploient des disciples de Gampopa. On les connaît collectivement comme les Dagpo Kagyu, Dagpo Rinpoché étant un autre nom de Gampopa. Les deux noms (comme bien des noms tibétains) touvent leur origine dans des lieux. Dagpo était, en fait le nom du lieu de naissance de Gampopa, et Gampo est le nom de la montagne sacrée où il établit le premier monastère tibétain Kagyu.

Vient ensuite un phénomène extraordinaire dans la lignée Kagyu : le principal disciple de Gampopa était le 1er karmapa, Dusum Chenpa. Il devait se réincarner encore et encore à partir de là, pour guider et protéger la lignée Kagyu. Il allait donc devenir le premier Tulkou du Tibet, ou gourou réincarné. Entre chaque réincarnation successive du Karmapa, la continuité de la lignée de vision intérieure spirituelle serait assurée par son disciple principal, qui retransmit les détails des enseignements à la réincarnation de son précédent gourou. Cette succession ininterrompue, de Tilopa à Narope, Marpa, Milarepa, Gampopa, les Karmapas, les Sitoupas, les Sharmapas, les Gyaltsabpas et les autres gourous est appelée le Rosaire d’Or des enseignants Kagyu :

Le Rosaire d’Or des enseignants Kagyu

  • Buddha Vajradhara
  • Lodro Rinchen
  • Saraha
  • Nagarjuna Buddha Vajradhara
  • Shawaripa Tilopa
  • Maitripa Naropa
  • Marpa Marpa
  • Milarepa
  • Gampopa
  • 1er Karmapa Dusum Chenpa
  • Drogon Rechen (Situ)
  • Pomdrakpa
  • Karma Pakshi (Karmapa 2)
  • Orgyenpa
  • Rangjung Dorje (K3)
  • Yungtonpa
  • Rolpe Dorje (K4)
  • Kacho Wangpo (Shamar)
  • Deshin Shekpa (K5)
  • Ratnabhadra
  • Tongwa Donden (K6)
  • Jampal Zangpo
  • Paljor Dondrup (Gyaltsab)
  • Chodrak Gyamtso (K7)
  • Tashi Paljor (Sanje Nyenpa)
  • Michö Dorje (K8)
  • 5è Shamarpa
  • Wangchuk Dorje (K9)
  • 6è Shamarpa
  • Choying Dorje (K10)
  • 7è Shamarpa
  • Yeshe Dorje (K11)
  • 8è Shamarpa
  • Changchup Dorje (K12)
  • 8è Tai Situ Choji Jungne
  • Dundul Dorje (K13)
  • 10è Shamar Mipam Chodrup
  • 9è Situ Pema Nyinche
  • Tekcho Dorje (K14)
  • Yonten Gyamtso (Kongtrul)
  • Khachap Dorje (K15)
  • 11è Tai Situ Pema Wangcho
  • Chentse Ozer (Kongtrul 2)
  • Rangjung Rikpe Dorje (K16)

Sa Sainteté le 16è Gyalwa Karmapas’en est allé en 1981 et sa réincarnation fut découverte au Tibet en 1992. Le 17è Gyalwa Karmapa est Urgyen Trinley Dorje, actuellement au siège tibétain traditionnel des karmapas : le monastère de Tsourphou au Tibet (NDT ces notes ont été rédigées avat la fuite du Karmapa du Tubet). Les principaux tenants actuels de la lignée sont le Khentin Tai Situpa et le Goshir Gyaltsabpa. Lorsque le temps sera mûr, ils retransmettront la forme extérieure des enseignements Kagyu au 17è Karmapa dont l’esprit représente la pureté et la clarté continuée des précédents Karmapas. Traditionnellement, on ne considère pas approprié d’inclure ces deux tenants de la lignée ou l’actuel Karmapa parmi la liste du Rosaire d’Or, avant que leur transmission formelle ait été accomplie.