Ya pihi irakema

ImAGE Contaminé

Chaque langue que porte la terre est tissée de sa propre représentation du monde. En ce sens, la langue est l’un des marqueurs d’identité.

Le langage apporte plus à l’humain que la capacité d’exprimer oralement des idées, elle lui permet la formation de la pensée. Notre langue maternelle est donc la première matrice permettant de concevoir le monde qui nous entoure et de structurer de notre pensée.

Hannah Arendt a exprimée «S’il n’y avait qu’une seule langue, peut-être serions-nous plus assurés de l’essence des choses»… Je doute de l’efficacité d’imposer une seule façon de faire, car l’essence des choses est au cœur de la diversité, nous sommes comme ces milliards d’étoiles dansantes dans l’univers et dont la force d’attraction nous pousse vers notre ultime destin, le rapprochement et le côtoiement des énergies.

La réalité, les phénomènes, les sentiments, le monde matériel sont nommés différemment d’une langue à l’autre, et parfois le mot n’existe même pas. Et cela ne met pas notre monde en péril.

Par exemple, la langue inuit utilise plus de vingt termes pour désigner la neige rendant ainsi compte de ses différentes formes. Les peuples ne vivant pas dans un climat nordique n’ont pas un seul mot pour désigner la neige.

Dans la tradition américaine et européenne, il est courant de voir les personnes endeuillées s’habiller de noir, tandis qu’en Asie, certains peuples, notamment, en Inde, au Viêtnam ou en Corée du Sud, les habitants portent des habits blancs. Et pourtant, ils vivent tous la même réalité.

David Servan-Schreiber rappelait que Pour dire je t’aime, les Indiens Yanomami en Amazonie disent : Ya pihi irakema, qui signifie j’ai été contaminé par ton être – une partie de toi y vit et y grandit.

Chaque langue est une approche pour décoder le monde et les règles de grammaire constituent la clé pour exprimer ce sens. Au regard de la diversité des langues, le lien entre le mot et ce qui est représenté est donc arbitraire. Il s’agit d’une convention d’un groupe d’humains.

Ce n’est pas la réalité, car elle est la vie telle qu’elle est, qui divise les humains, mais c’est l’imposition d’une certaine représentation du monde et d’un code de langage.

Si selon Gilles Vigneault, la violence, c’est un manque de vocabulaire, pour moi l’amour implique l’acceptation et le respect de la vision de l’autre.

Les mots que l’on utilise sont porteurs d’une grande énergie, parfois de bonté et d’attention, parfois de mépris et de préjugés.  Nous avons le choix d’exprimer l’émerveillement que nous éprouvons devant la beauté, ou de tout faire pour convaincre l’autre et faire de l’objet de l’émerveillement ultimement un objet de laideur.

Une chanson de Gilles Vignault  interprétée par par un collectif – Le gens de mon pays

 

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