Au feu rouge

Chanson de Grand Corps Malade – Au feu rouge

Yana est une jeune réfugiée syrienne que chacun d’entre nous pourrait rencontrer au prochain feu rouge auquel il s’arrêtera. Dans cette chanson pleine d’humanité, Grand Corps Malade veut redonner leur dignité à ceux que l’on nomme « réfugiés », pour voir les êtres humains derrière les chiffres, les mots et les regards.  Propos partagés par Myriam.

Le texte

Au feu rouge Heureusement je n’ai pas d’enfant se dit Yana très souvent Ce serait encore plus dur, encore plus humiliant Et puis comment elle aurait fait avec un bébé comme paquetage Est-ce qu’il aurait survécu après tout ce voyage Yana a fuit les bombes, la guerre dans son pays Elle sait qu’elle avait peur mais ne sait plus de quels ennemis Entre les tirs de son président, des rebelles, de l’Occident De Daech et des kurdes, elle ne sait plus d’où vient le vent Elle ne sait plus d’où vient la poudre qui a rasé son village Elle ne sait plus qui tire les balles qui ont éteint tous ces visages Elle sait juste que l’homme est fou et que c’est là-bas en Syrie Que s’est formé petit à petit l’épicentre de sa folie Yana pense à tout ça en s’approchant de ma vitre Moi je lui dis non avec ma main et je redémarre bien vite J’avais peut-être un peu de monnaie mais j’suis pressé, faut qu’ je bouge Je me rappelle de son regard, j’ai croisé Yana au feu rouge Après trois mois de périple dans toutes sortes d’embarcations Elle a souvent cru que la mort serait la seule destination Comme lors de cette nuit noire, au milieu de la mer Égée Dépassée par les vagues, sur un bateau bien trop léger Entre les centres de rétention et les passeurs les plus cruels Yana a perdu de vue tous ceux qui avaient fui avec elle Elle s’est retrouvée seule avec la peur, le ventre vide Et des inconnus aussi perdus qu’elle comme seuls guides Marchant pendant des semaines, puis payant à des vautours Le droit de se cacher à l’arrière des camions sans voir le jour Après ces mois d’enfer, elle passe ses nuits sur un carton Son Eldorado se situe Porte de La Chapelle, sous un pont Yana pense à tout ça en s’approchant de ma vitre Moi je lui dis non avec ma main et je redémarre bien vite J’avais peut-être un peu de monnaie mais je suis pressé, faut qu’ je bouge Je me rappelle de son regard, j’ai croisé Yana au feu rouge Dans ses nuits, les cauchemars d’expulsion sont réguliers Elle attend d’obtenir le statut de réfugiée Elle mendie au feu rouge avec la détresse comme bâillon Elle se renseigne sur ses droits, petite princesse en haillons Elle imagine parfois sa vie d’étudiante dans son pays Si la justice avait des yeux, si la paix régnait en Syrie Elle sourit même parfois quand elle trouve la force d’y penser Elle rêve en Syrien, mais là elle pleure en Français J’aperçois Yana rapidement lorsque le feu passe au vert J’ai un petit pincement au cœur, mais j’suis en retard et j’accélère Les plus grands drames sont sous nos yeux, mais on est pressé faut qu’on bouge Y’a des humains derrière les regards, j’ai croisé Yana au feu rouge

Laisser un commentaire