Les trois yeux de la connaissance

Inde varanasi

L’affirmation selon laquelle tout le monde est en réalité Brahman amène bien souvent les êtres trop imaginatifs à concevoir des fantaisies telles qu’une présence uniforme, omniprésente, terne mais divine, l’évaporation instantanée et totale de toute diversité et multiplicité, laissant derrière elle une vacuité céleste omnisciente, miséricordieuse immaculée mais amorphe.

Nous ne concevons de telles sottises que parce que nous supposons que la déclaration : « Tout est Brahman » est une proposition logique, contenant une certaine information mentale relative à l’univers, et ce faisant sa signification ne peut que nous apparaître comme la réduction de toute multiplicité à un magma uniforme, homogène et immuable.

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Si vous croyez bien connaître Brahman, ce que vous connaissez de Sa nature est bien peu de choses, en réalité ; aussi devriez-vous considérer encore plus attentivement Brahman… Celui d’entre nous qui comprend la signification de ces mots : « Je ne Le connais pas, pourtant je Le connais », celui-là le connaît. Celui qui croit ne pas comprendre Brahman, celui-là Le comprend ; mais celui qui croit comprendre Brahman, celui-là ne Le connaît pas. Brahman est inconnu de ceux qui Le connaissent et connu de ceux qui ne Le connaissent pas du tout. C’est-à-dire que l’état même de non-connaissance de Brahman EST l’État de Conscience Ultime, et c’est exactement l’état que vous connaissez maintenant.

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Le Védanta pur n’a jamais considéré maya, l’illusion, comme étant différente de Brahman, mais plutôt comme quelque chose que fait Brahman. Or nous parlons toujours d’échapper à samsara comme s’il était différent du nirvana ; nous essayons de surmonter l’ignorance comme si elle n’était pas l’éveil ; nous nous efforçons de dissiper maya comme si ce n’était pas Brahman.

Ken Wilber dans Les trois yeux de la connaissance

Une pièce musicale de Anoushka Shankar e Patricia Kopatchinskaja – Raga Piloo