Se gaver de croyances et d’idées toutes faites

Concentre toi

Au-delà du formatage social assuré par ces grandes histoires collectives qui, rappelons-le, sont rarement mises en doute ou remises en question, de nombreuses histoires circulent pour imposer des visions idéologiques que les individus finissent par intérioriser.

Par exemple :

  • La nature est source de bonheur, contrairement à l’espace urbain, bétonné, bruyant, polluant. Pour vous ressourcer, allez dans la nature, respirez le grand air, dussiez-vous vous y ennuyer à mourir !

  • Ce qui est naturel est bon ! Phrase qui sonne comme un slogan publicitaire — ce qu’elle est devenue sous la plume (ou plutôt le clavier) de professionnels du marketing sans scrupule. Et pourtant, la nature produit des poisons en masse et le spectacle qu’elle offre n’est pas exempt de cruautés de toutes sortes !

  • Les légumes crus sont plus sains, car la cuisson détruit beaucoup de vitamines et d’autres éléments nutritifs. Et pourtant ! N’essayez surtout pas les pommes de terre crues, impropres à la consommation, ou les haricots crus, toxiques. L’ail et l’oignon sont mieux supportés cuits. Le bêta-carotène des carottes n’est assimilé que lorsque les parois cellulaires du légume ont été dégradées par la cuisson.

  • Le progrès est source de bien-être. Imaginez-vous la vie sans lave-vaisselle, sans voiture, sans ordinateur, sans téléphone mobile… Étiez-vous vraiment plus malheureux avant l’avènement du téléphone mobile ? Doit-on accepter tout ce que la technologie nous propose sous le prétexte qu’il s’agit de progrès ? Une étude (Sonja Lyubomirsky, Comment être heureux et le rester, 2007, p. 51) a par exemple montré que, en 1940, les Américains évaluaient leur satisfaction générale dans la vie à 7,5 sur une échelle allant jusqu’à 10. Un tiers des foyers n’avait pas l’eau courante, ni toilettes intérieures, ni douche, et seule la moitié disposait d’un chauffage central. De nos jours, malgré les lave-vaisselles, fours micro-ondes, machines à laver, écrans plats, ordinateurs, le score actuel de satisfaction chez les Américains est de 7,2 !

  • Le libéralisme économique est le système capable d’amener richesse et prospérité. Tel était le credo, preuves à l’appui sous forme de bénéfices mirobolants réalisés par les multinationales (avec un coût désastreux sur le plan humain, délocalisation et exploitation obligent !) et de bonus colossaux accumulés par les grands patrons… « Étaient », car la crise financière de 2008 a révélé les failles du système et en a montré les limites, à grands renforts de capitaux étatiques pour éviter que tout l’ensemble ne sombre corps et biens !

  • La croissance est ce qui importe. C’est le seul baromètre économique pour évaluer l’état d’une société. Alors que sur une planète aux ressources limitées, il n’est ni possible, ni même souhaitable de produire et consommer toujours plus…

Force est de constater que nous sommes gavés de croyances et d’idées toutes faites. Certaines de ces histoires se révèlent véridiques pour nous : elles traduisent adéquatement ce que nous expérimentons, alors que d’autres en sont aux antipodes. Il faudrait ne jamais oublier que ces histoires ne sont  » que  » des histoires, des fils rouges pour décrypter le monde, des références à consulter pour s’orienter dans l’inconnu, sortes de jalons en terres vierges, mais rien de plus.

Yves-Alexandre Thalmann dans Les gens heureux ne s’inquiètent pas de savoir si c’est vrai, ils se racontent de belles histoires

Une pièce musicale de Peter Gabriel – The feeling begins

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