C’est une chose étrange à la fin que le monde

ImAGE plumes envol

Les hommes découvrent et ils inventent. Quand ils découvrent, les unes après les autres, les lois cachées de la nature et ce qu’ils appellent la vérité, ils font de la science. Quand ils se livrent à leur imagination et qu’ils inventent ce qu’ils appellent de la beauté, ils font de l’art. La vérité est contraignante comme la nature. La beauté est libre comme l’imagination.

Copernic découvre. Galilée découvre. Newton découvre. Einstein découvre. Et chacun d’eux détruit le système qui le précède.

Homère invente. Virgile invente. Dante invente. Michel-Ange, Titien, Rembrandt, Shakespeare, Racine, Bach et Mozart, Baudelaire, Proust inventent. Et aucun d’entre eux ne détruit les œuvres qui le précèdent.

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Il n’y a jamais eu qu’un roman : c’est le roman de l’univers. Et il y a un seul romancier : c’est moi.

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Il y a l’amour, le savoir, l’intelligence, la curiosité, l’ambition et tous leurs succédanés : la rivalité, la haine, l’envie, la jalousie, la fureur, la bêtise, la folie. Il y a la guerre, le chagrin, le malheur, la révolte. Vous mettez tous cela ensemble, vous secouez le puzzle, vous en faites tomber des morceaux, vous peignez des Vierges, des courtisanes et des pommes, vous sculptez des saints et des héros, vous élevez des pyramides, des temples, des cathédrales, des échangeurs et des ponts suspendus, vous écrivez des romans, des tragédies, des Mémoires, des symphonies, des systèmes de l’univers, des manuels du pêcheur ou du parfait bricoleur et des théogonies. Vous aimez vous souffrez, vous vous souvenez, vous vous massacrez, vous découvrez des vieux : c’est le roman du monde.

Jean d`Ormesson dans C’est une chose étrange à la fin que le monde

Une pièce musciale de Ludovico Einaudi – Oltremare

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