Humain, trop humain, tome 1

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Les gens à qui leur vie quotidienne paraît trop vide et monotone tournent facilement à la religion : c’est compréhensible et pardonnable, seulement ils n’ont pas le droit d’exiger de la religiosité de ceux dont la vie quotidienne ne se perd pas dans le vide et la monotonie.

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C’est parce que l’homme a cru, durant de longues périodes, aux idées et aux noms des choses comme à des aeternae veritates, qu’il s’est donné cet orgueil avec lequel il s’élevait au-dessus de la bête : il pensait réellement avoir dans le langage la connaissance du monde. Le créateur des mots n’était pas assez modeste pour croire qu’il ne faisait que donner aux choses des désignations, il se figurait au contraire exprimer par les mots la science la plus élevée des choses : en fait, le langage est le premier degré de l’effort vers la science.

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Si tous ceux qui nourrissaient une si grande idée de leur conviction, lui faisaient des sacrifices de toute nature et ne ménageaient à son service ni leur honneur, ni leur vie, avaient plutôt consacré ne serait-ce que la moitié de leurs forces à rechercher à quel titre ils tenaient à telle ou telle conviction, par quelle voie ils y étaient arrivés, quel air pacifique aurait l’histoire de l’humanité !

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Les mauvaises actions qui nous indignent le plus actuellement reposent sur l’erreur que l’autre, qui nous les inflige, a une volonté libre, c’est-à-dire qu’il n’aurait tenu qu’à son bon plaisir de ne pas nous faire ce mal. C’est cette croyance au bon plaisir qui suscite la haine, le besoin de vengeance, la ruse, toutes les perversions de l’imagination, alors que nous en voulons beaucoup moins à un animal parce que nous le considérons comme irresponsable.

Friedrich Nietzsche dans Humain, trop humain, tome 1

Une pièce musicale de Yoav – Adore adore

Les paroles en français sur https://www.lacoccinelle.net/292287.html

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