Le Colonel et l’enfant-roi

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Je suis né dans une ville enceinte de lumière qu’un fleuve têtu traverse lentement. Je suis né entre deux rives, femelles engrossées, qui bataillent le désert depuis la nuit des temps.

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Arméniens, Juifs, Libanais, Maltais, Français, Grecs, Italiens, Anglais, Égyptiens. Tout ce sang mêlé aujourd’hui réduit à un seul et unique rhésus.

Tout agonise dans les poussières et le spectre du phare qui se dressa un jour d’il y a longtemps sur l’île de Pharos. Aujourd’hui, ville noire, photo jaunie. Jardins fanés des soupirs. La rouille a rongé les immeubles haussmanniens d’antan. Le tramway roule toujours, mais ses wagons semblent désarticulés. Les fiacres ont déserté la place Méhémet Ali. A Ramleh, la plage du Sporting s’émiette sur la grève. Le Carlton hôtel, à Stanley Bay, s’affaisse sur ses fondations. La place dite des Consuls a implosé. On ne jouera jamais plus sur la scène du théâtre Zizinia.

Gilbert Sinoué dans Le Colonel et l’enfant-roi : mémoires d’Égypte

Une pièce musicale de Mohamed Rouane -Evasion

 

2 réflexions sur “Le Colonel et l’enfant-roi

  1. C’est un très beau livre qui parle depuis les années 30 au temps de l’avenement du roi Farouk jusqu’au debut des années 50 avec l’établissement de la république avec un très beau style narratif comme si tu voyais un film

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