La route d’Ispahan ou Avicenne

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Suis-le à travers le vaste plateau qui compose mon pays, tantôt torride, tantôt glacé, ses étendues désertiques et salées… Pour toi les caravanes déballeront les gemmes et les épices du pays jaune, les armures de Syrie, les ivoires de Byzance. Dans les bazars d’Ispahan rouleront sous tes pas les fourrures, l’ambre, le miel et les esclaves blanches….

Tu coucheras parmi les gueux et dans la splendeur des palais. Tu traverseras des villages oubliés, aux ruelles étroites et aux maisons aveugles. Tu pénétreras le secret des puissants, l’intimité des sérails, la volupté des harems. Tu verras souffrir pareillement les princes et les mendiants et tu te convaincras ainsi (si un doute subsistait en ton esprit) que nous sommes éternellement égaux devant la douleur….

Tu apprendras le mépris devant la petitesse des puissants, tu connaîtras le respect devant la grandeur des petits.

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Quoi qu’il arrive n’oublie jamais ceci: notre existence s’écoule en quelques jours. Elle passe comme le vent du désert. Aussi, tant qu’il te restera un souffle de vie, il y a deux jours dont il ne faudra jamais t’inquiéter : le jour qui n’est pas venu, et celui qui est passé.

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Lorsque nous disons que nous aimons, qu’est-ce que cela veut dire ? Simplement, que nous possédons. Puisque dès l’instant que nous perdons la personne aimée nous nous sentons perdus, vides de tout. En réalité, en disant que nous aimons, nous ne faisons que légaliser un sentiment de possession.

Gilbert Sinoué dans Avicenne ou la route d’Ispahan

Une pièce musicale de Fauré – Les roses d’Ispahan

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