L’incertitude

ob_d4cebd_yeux-emerveilles

Garçon qui vient à cette page (peut-être ces mots-là n’étaient-ils pas écrits, mais mon cœur me les dicte à l’entrée de l’histoire) sache que dans la demeure céleste où tu vivais avant de naître tout était que silence et savoir. Il fallut un jour la quitter.

A l’heure juste, ton père d’En haut t’a dit : « Va. » Il a ouvert la porte. Tu as découvert devant toi des chemins innombrables, des monts, des plaines, des villes, des forêts.

Tu t’es effrayé. Tu as gémi : « Dans ce chaos furieux, comment vais-je survivre ?

Tu dois aller, a répondu ton père. Quelque chose te manque ici, qui est en bas. »

Il t’a serré sur sa poitrine. Tu as senti battre son cœur. Tu as pensé qu’il ne pouvait te chasser ainsi de sa bienheureuse maison.

Tu lui as dit : « Tout est ici lumière et connaissance. Que me manque-t-il donc ? »

Ton père a murmuré : « La nuit, l’incertitude. »

Tu ne connaissais pas le sens de ces mots. Tu as crié, tremblant : « Qu’y a-t-il donc de si précieux dans le doute, dans les ténèbres ?

La foi que rien ne prouve, a répondu ton père, le désir pur, la confiance ignorante. Pour l’atteindre, mon fils, il te faut oublier nos savoirs infinis. »

Il a posé l’index au travers de ta bouche afin que désormais tu ne puisses plus dire ce que toujours tu savais. Il t’a poussé dehors. Tu es venu au monde.

Enfant, regarde-toi. Entre le bas du nez et le milieu des lèvres est un sillon creusé. C’est là l’empreinte de son doigt

Henri Gougaud dans Paramour

Une pièce musicale de Mozart Lacrimosa Requiem en ré mineur version Thérémin et piano

Laisser un commentaire