(appel au bon vivant)
Non
la vie n’est pas ça
qu’on voudrait nous faire avaler
cette chose proprette
et sans risque
vie ah prémunie de tout
vie oh protégée de tout
bardée de préventions
harnachée de précautions
recluse dans ses peurs préventives
condamnée à la préventive
ad vitam aeternam
nom de dieu non
vous ne vivrez pas une vie d’homme
sans dangers hein
sans failles tiens
sans blessures non
sans souillures quoi
sans poussières sans
sans l’humeur et la sueur
sans malfaçons de corps
sans les fleuves violents hargneux
sans les vents forcenés hargneux
sans les excès brutaux
de la neige et du feu
sans le hasard de la chute
sans la faiblesse et
sans la perte
sans souffrir et et
sans vieillir
ou alors vous ne vivrez pas
car nom de Dieu vivre
n’est pas sur
vivre est un vol de papillon
dans les flammes
marcher est un risque
respirer est un risque
dés le premier pas le premier souffle
dans la vie
*
exister contre contre et contre
contre tout ce qui menace
le ciel la rire
et la main de l’autre
le sol qui glisse
le virus montre qui guette
le gras dans l’artère
ah vous vivrez grotesques cons contre
vous vivrez contre la vie
corsetés de pleine santé
dans le vide du monde
thésaurisant les ans comme
des banquiers avares et pleutres
prétendant crétins garder intègre
ce qui est infinie déperdition
*
j’en appelle aux vivant
aux bons vivants
hardi sabre au clair
montons aux barricades du plein plaisir
de la vie pleine et entière
de la vie jouissante
buvons bras levés et le coeur haut
les vins savants et
les alcools rares
fumons les tabacs subtiles
place aux paresses savoureuses
aux voluptés de gorge
aux bouches humides
aux corps qui abondent
qu’on nous laisse jouir et rejouir
dans l’abandon bruissant
des bistrots enbrumés
dumons nos pipes
des savanes brulantes
baisons à pleines lèvres
des ivresses chaudes
coude à coude et la voix lourde
de viandes ruisselantes
que le coeur nous batte trop vite
mais qu’il batte
que l’air trop tôt nous manque
mais qu’il ait des saveurs
âcres et fortes et que l’âme
ait ses sueurs oui
mais dans les vertiges
nous mourrons oui
nous mourrons bientôt
comme vous mais vivants
nous craignons la mort oui
parce qu’elle nous prive
mais nous malins vous
vous privez de vivre
par crainte de la mort
or donc vous survivrez
intouchés et intègres
dans vos cages de verre
mais nous viveurs à pleine chair
déréglés de tous les sens
nous nous risquerons
dans la contagion des plaisirs
avec nos dents d’ogre
buvant fumant baisant
rongeant nos joies poivrées
jusqu’à l’os
usés et impurs mais
libres.
Jean-Pierre Siméon dans Sermons joyeux. De la lente corruption des âmes dans la nuit tombante.
Oh oui ! Bonne journée aussi à vous.
J’aimeAimé par 1 personne
Un passage vers un autre état. Bonne journée
J’aimeAimé par 1 personne
La mort n’est pas un risque, mais bien notre Destin. Alors la vie est une véritable aventure, pleine de risques, et je suis sûre que ce risque est un état de complétude. Nous aimerions dire ces choses qui sont belles et les partager avec amour, sans peur, sans paraître absurde. Je comprends ce texte…
Merci.
J’aimeAimé par 2 personnes