L’acceptation au sens Zen

Notre difficulté de compréhension découle de l’évidence même du Zen. Nous faisons inlassablement fausse route parce que notre recherche porte sur un mystère. Les yeux fixés sur l’horizon, nous ne voyons pas ce qui se passe à la hauteur du sol. Pour citer Hakuin dans son Chant de la Méditation :

« Tous les êtres sont, à l’origine, des Bouddhas,

C’est comme la glace et l’eau,

En dehors de l’eau, la glace ne peut se former,

Hors des êtres doués de sentiment, où cherchons-nous le Bouddha ?

Ne sachant pas combien proche est la Vérité,

Les gens la cherchent au loin…

A l’image de celui qui, au milieu de l’eau,

Crie sa soif en se lamentant. »

L’homme est souvent trop orgueilleux pour observer les choses évidentes le concernant directement. Ainsi, le Zen vit les adeptes du Mahayana poursuivre la vérité dans les écritures, auprès des sages et des Bouddhas, pensant qu’elle leur serait révélée s’ils adoptaient un mode de vie correct.

La prétendue humilité, selon laquelle l‘homme croit que la sagesse est une chose trop sublime pour daigner se manifester dans les événements de la vie courante, est en réalité une forme subtile de l’orgueil. Il est convaincu qu’il ne pourra accueillir la vérité aussi longtemps qu’il ne sera pas détaché des préoccupations terrestres. Son orgueil est tel qu’il ne consentira à recevoir la sagesse que des lèvres mêmes du sage ou par l’intermédiaire des écritures sacrées. Il ne la perçoit ni dans les êtres humains, ni dans les événements de la vie de tous les jours, ni en lui-même, puisque là encore son orgueil l’empêchera de se voir tel qu’il est. Loin de chercher la vérité, il avance vers les Bouddhas en cachant ses imperfections derrière le voile de ses actions méritoires.

Cette préparation méticuleuse en vue de trouver la vérité dans le futur ou par l’intermédiaire d’un agent extérieur revient, selon le Zen, à repousser le moment de la vision des faits, bons ou mauvais, dans leur vérité à quiconque ne sait la percevoir en lui-même : quiconque ne sait la percevoir dans l’instant présent ne peut s’attendre à en recevoir la révélation dans un temps futur.

C’est pourquoi le Zen enseigne qu’aucun être ne peut trouver le Bouddha dans un paradis ou dans des sphères célestes, s’il ne l’a auparavant découvert en lui-même et dans tout être doué de sensibilité. De même, aucun être ne peut espérer trouver l’Illumination dans un ermitage, s’il n’en a pas déjà eu la révélation dans son cadre de vie habituel.

La philosophie mahayaniste précise, en effet, que toute chose – aussi vile en apparence, aussi insignifiante qu’elle soit – est un aspect de la nature-de-Bouddha. Par conséquent, il nous faut accepter toute chose et tout être.

Alan Watts dans L’esprit du Zen

Une pièce musicale de Peter Gabriel – ACROSS THE RIVER 

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