Entre ciel et chair

Pendant longtemps la souffrance n’a pas cessé de me chauffer à blanc sans que rien ne soit modifié dans mon existence. Et soudain, un changement radical s’opéra : l’aptitude à souffrir me fut ôtée. Oui, je crois que l’expression est bonne : l’aptitude à souffrir me fût ôtée ! Ce ne furent pas les événements ni les conditions de mon existence d’alors qui furent changés mais ma seule manière de les appréhender.

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Cet amour dont j’ai bu la coupe jusqu’à la dernière goutte, pourquoi gémir de l’avoir perdu plutôt que jubiler de l’avoir eu ? Que de choses dont seule la privation m’avait hantée jusqu’alors et dont je m’émeus aujourd’hui de les avoir connues !

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D’où vient votre haine ? Hommes de mon siècle et hommes d’Église, pourquoi méprisez-vous celles qui vous ont conçus, portés, celles dont les mains ont reposé sur vos fronts aux nuits brûlantes de fièvre de votre enfance, celles qui tissent et cardent vos vêtements et vous nourrissent, celles qui vous assisteront à l’heure de mourir, vous fermeront les yeux et vous coudront dans vos linceuls, celles qui tiennent du sensible et du palpable leurs connaissances, celles qui deux fois vous mettent au monde : en mère d’abord puis en amante ?

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La libération, c’est cette qualité d’attention et d’amour portée à nous-mêmes, aux autres, aux choses qui l’amènent. Obstinée, aveugle à tout le reste j’ai traversé la passion. Je comprends aujourd’hui qu’elle s’apparente à la sainteté ; école du dénuement, renoncement à tout le reste.

Christiane Singer dans Une passion : Entre ciel et chair

Une pièce musicale Omar Khairet, Fatma, con. Adel Shalaby عمر خيرت – فاطمه باوركسترا المانى قيادة عادل شلبى

Une réflexion sur “Entre ciel et chair

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