Le jardin de Badalpour

Celui qui dit que l’habit ne fait pas le moine ne comprend rien aux femmes. Non seulement Zahr paraît autre, mais elle se sent une autre. En endossant la robe de son pays, la robe portée depuis des siècles par ses aïeules, elle a soudain l’impression de se retrouver, la sensation que l’image que lui renvoie le miroir correspond à une image intérieure d’elle-même, qu’elle reflète sa vraie personnalité, et que jusqu’à présent, elle avait habité des vêtements étrangers. Elle qui n’a jamais beaucoup aimé son apparence, qui ne s’est jamais trouvée tout à fait à l’aise dans sa peau, pour la première fois se sent naturelle, en harmonie avec elle-même. Sa démarche, tous ses gestes se sont faits à la fois plus gracieux, moins brusqués, déliés. L’ampleur des vêtements permet une liberté du corps et des attitudes, une noblesse que n’autorisaient pas les robes ni les pantalons serrés à l’occidentale. Elle se reconnaît et elle se plaît.

*

La beauté est en Inde confondue avec la blancheur de la peau – préjugés lié au fait que conquérants venus de l’Ouest, des Aryens aux Britanniques, furent toujours des Blancs, et que la blancheur en vint par conséquent à être assimilée à l’élite, à ce qui est rare et donc admirable. D’où une autodépréciation de l’immense majorité, foncée de peau – une sorte d’autoracisme.

*

Une idée n’est ni juste ni fausse ; elle est simplement en accord ou non avec les attentes d’un certain nombre de gens à une époque donnée. C’est son efficacité seule qui la fait qualifier de « juste », ce qui signifie en réalité qu’elle « s’ajuste » aux besoins du moment.

*

La vie lui a appris que les complications sont à la portée de tous, mais qu’en revanche, il n’est rien de plus difficile à atteindre que la simplicité

Kenizé Mourad dans Le jardin de Badalpour

Une pièce musicale de Sound of Rajasthan | Sway to music of Ravanhatta a traditional Rajasthani instrument

Laisser un commentaire