D’éternité

Les ans ont pu modifier le corps, quand donc le trésor du cœur a-t-il changé ? Le cœur peut être enfoui, scellé, il demeure une pièce de jade qui reluit même au sein des ténèbres.

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Maintenant que les deux prédestinés se sont véritablement retrouvés, aucun obstacle, aucune maladie, ne pourra plus entraver leur route !

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La vie de chacun, longue traversée et long détour, n’apporte-t-elle pas sa part de lumière pour éclairer le sens de leurs retrouvailles ?

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Il y a tant de choses qui restent à dire. Cette vie y suffira-t-elle ? Parlons calmement et lentement, c’est cela. Nous avons attendu si longtemps, nous connaissons la vertu de la patience, n’est-ce-pas ? Laissons d’abord le vent printanier qui a l’habitude de résorber la pluie sécher nos larmes. Laissons ensuite le soleil d’été qui fait tout s’épanouir, réchauffer nos rêves, gelés dans la nuit de l’attente. Sais-tu que les vrais trésors sont délicats et cachés, et que le cœur d’une femme est riche et profond comme un jardin ? Pour atteindre la vraie profondeur, il faut suivre des sentiers pleins de méandres ; il faut longer des sentiers pleins de secrets. Il y a encore par-delà les feuillages, l’humble étang avec les libellules qui l’effleurent, des feuilles de lotus qui l’abritent. Sauras-tu t’asseoir auprès de cet étang, prêter l’oreille à ce qui y murmure, prêter le cœur à ce qui y palpite ? Les pétales de fleurs, gorgés de rosée, y éclosent en un geste d’accueil ; trop ouverts, ils prennent le risque de se détacher, de se faner. Sauras-tu alors capter non seulement la beauté qui se montre en surface, mais qui jaillit de la racine, le désir même de beauté qui ne tarit jamais ? Et puis surtout, il y a l’eau transparente qui, apparemment est peu de choses mais qui contient tout un autre ciel. La lune s’y mire toujours pareille, toujours nouvelle ; les nuages s’y déploient, à l’infini…

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Chacun butine ce qu’il cherche ; chacun entend ce qui lui chante.

François Cheng dans L’éternité n’est pas de trop

Une pièce musicale On the Nature of daylight (Shutter Island) par l’orchestre Gabriel Fauré