Petite parabole

Un pèlerin cheminait sur la crête rocailleuse d’une vallée. Il entendit soudain un feulement. Sur un rocher, il aperçut un tigre prêt à bondir sur lui. Affolé, le malheureux se mit à courir sur l’étroit sentier. Emporté par sa précipitation, il tomba justement dans un précipice. Heureusement, il réussit à se retenir à des branchages qui arrêtèrent sa chute. Un grondement résonna au-dessus de sa tête, il leva les yeux et vit que le fauve attendait patiemment qu’il remonta pour le dévorer. Un sinistre sifflement retentit en contrebas. Là, sur un promontoire, un immense serpent était prêt à le piquer s’il descendait. Un autre bruit parvint encore à ses oreilles : un grignotement. L’homme découvrit avec stupeur que l’arbuste qui le retenait à la vie était rongé par deux rats, l’un blanc et l’autre noir. Suspendu dans le vide, entre ciel et terre, l’infortuné acrobate eut le regard attiré par une tache rouge dans les broussailles. C’était une grosse fraise sauvage, vermeille, pulpeuse. Malgré sa position périlleuse, il la cueillit d’une main, la porta à ses lèvres, la savoura. Hum, quel délice !

Ne demeurez pas dans le passé, ne songez pas au futur ; le passé s’est évanoui, le futur n’est pas encore advenu.

Contemplez ici et maintenant les dons du présent.

Pascal Fauliot a publié en 1980 les Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon qui connaîtront un succès international. A la même époque, il rejoint le Centre de Littérature Orale animé par Bruno de la Salle où il participe à des créations de contes musicaux pour le Festival d’Avignon et France Culture. Il fondera par la suite la Compagnie Hamsa et deviendra le directeur artistique du Festival du Légendaire.

Spécialiste des contes de sagesse et des légendes de l’Asie, Pascal Fauliot ne cesse de les collecter et de les réécrire. Sensible à la musicalité de la parole, il s’évertue à en faire résonner leurs sens et leurs saveurs originels.

Pascal Fauliot dans Contes des sages bouddhistes

Une pièce musicale de Schubert: 4 Impromptus, Op. 90, D.899 – No. 2 In E Flat: Allegro