Esprit Zen, esprit neuf

Lorsque vous pratiquez la méditation Zen, n’essayez pas de stopper vos pensées. Si quelque chose se présente dans votre esprit, laissez entrer, laissez sortir. Lorsque vous essayez de stopper vos pensées cela veut dire qu’elles vous dérangent. Ne soyez dérangé par rien. Laissez la porte de devant et la porte de derrière ouvertes. Autorisez vos pensées à entrer et sortir. Simplement, ne leur servez pas le thé.

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Vous devez étendre bras et jambes aussi loin que possible. La forme est forme. Vous devez être fidèle à votre propre voie jusqu’à ce que vous atteigniez réellement le point où vous voyez qu’il est nécessaire d’oublier tout ce qui vous concerne. Avant d’atteindre ce point, c’est une erreur de penser que tout ce que vous faites est zen ou que peu importe si vous pratiquez ou non. Mais si vous faites de votre mieux simplement pour continuer à pratiquer de tout votre corps et de tout votre esprit, sans idée d’acquisition, alors tout ce que vous ferez sera la vraie pratique. Votre but devrait être simplement de continuer. Quand vous faites quelque chose, votre but devrait être simplement de le faire. La forme est forme et vous êtes vous, et dans votre pratique sera réalisée la vraie vacuité.

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Ce que nous appelons « je » n’est qu’une porte battante qui va et vient quand nous expirons et inspirons.

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L’essentiel est d’oublier toute idée d’acquisition, toute idée dualiste.

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Afin de ne laisser aucune trace, quand vous agissez, vous devriez le faire de tout votre corps et de tout votre esprit, vous concentrer sur ce que vous faites. Vous devriez le faire a fond, comme un bon feu de joie. Vous ne devriez pas être un feu qui fume. Vous devriez vous consumer totalement. Si vous ne vous consumez pas totalement, une trace de vous-même restera dans votre activité. Il vous restera quelque chose de non totalement consumé. L’activité zen est l’activité totalement consumée, sans autre reste que des cendres. Ceci est le but de notre pratique. C’est ce que voulait exprimer Dogen en disant : « Les cendres ne redeviennent pas du bois pour le feu. » La cendre est cendre. La cendre doit être totalement cendre. Le bois doit être bois. Quand cette activité-là se produit, une seule activité embrasse tout.

Shunryu Suzuki (1904-1971), de la lignée du Zen Soto, était un descendant spirituel direct du grand Dogen. En 1958, à cinquante-trois ans, maître zen déjà profondément respecté au Japon, Suzuki-roshi vint aux États-Unis et s’installa à San Francisco. Ceux qui voulaient se joindre à sa pratique firent éclore sous sa direction le groupe de méditation dit Zen Center qui a essaimé en sept centres, y compris le Zen Mountain Center, premier monastère zen hors d’Asie. Il était sans conteste l’un des plus influents maîtres zen de nos jours. Ce livre est né d’entretiens familiers, en Californie.

Shunryu Suzuki dans Esprit Zen, esprit neuf

Une pièce musicale Macro Dimension – « Raku » by Eric Aron – photos by Namaki