Entrainement mental 3

an art work by T Newfields (Nitta Hirou)

Entrainement mental, la pensée et les émotions 2

On ne fabrique pas la colère, elle s’élève d’elle-même,  et en plus l’orgueil est un processus d’identification naturel, alors…

L’entrainement mental peut modifier cela. Si l’on commence à appliquer les antidotes, seul et avec les autres, le processus s’inverse peu à peu. Alors qu’on allait être sous le contrôle d’une émotion, on se souvient de la respiration, puis de l’antidote, on respire, et on le met en pratique et on modifie notre réaction à  l’émotion.

Cela nous conduit à un deuxième type d’état d’entrainement qui est un regard beaucoup plus direct sur l’émotion. Il ne s’agit pas cette fois d’apporter un antidote spécifique à chaque émotion, mais plutôt d’arrêter d’écouter ce que nous dit l’émotion ou la pensée et d’essayer de voir simplement son mouvement.

Une émotion ?

C’est comme un mouvement. Prenons la colère par exemple. Quelque chose nous irrite, quelqu’un nous agresse, et tout à coup la colère s’élève. Que se passe-t-il en réalité ?

C’est un mouvement dans l’esprit, quelque chose qui prend place et envahit aussi bien l’esprit que le corps. Un peu comme l’eau qui s’écoule, elle s’immisce partout.

Si l’on écoute et laisse la colère prendre le contrôle, on lui donne de fait la possibilité de représenter la réalité actuelle,  si l’on s’identifie à elle, elle nous maîtrise; on dira ce qu’on ne voulait pas dire et on fera peut-être ce qu’on ne voulait pas faire.

Mais si, plutôt que de se laisser contrôler par la colère, plutôt que de s’identifier à elle, on la laisse s’élever sans la saisir, et on lui laisse de l’espace, regardant simplement son mouvement, essayant de voir d’où elle s’élève, où elle prend place, où elle disparaît, on ne pourra rien trouver de réellement existant pour modifier notre perception de la situation. Au lieu de devenir acteur de la colère, on est spectateur, on respire, on voit ce qui en découle et ou elle va.

Il en va de même pour les autres émotions, idées, sensations, perceptions, pour tout ce qui s’élève dans l’esprit. Plutôt que de saisir ce qui perturbe, plutôt que de le laisser s’identifier, l’esprit se regarde lui-même. Si on ne saisit pas la pensée ou l’émotion perturbante qui s’élève, si on ne s’identifie pas à elle, alors elle traverse et devient ce qu’elle est d’elle-même, sans attache. L’esprit s’est agité et s’est aussi rapidement pacifié.

C’est une perspective importante de l’entrainement mental. Si l’on détend cet esprit qui est lié, il se libérera.

Cela signifie que, lorsqu’on détend l’esprit, lorsqu’on lui laisse l’espace suffisant pour se déployer de lui-même il se pacifie, exactement comme une vague qui s’élève de l’océan et qui retourne d’elle-même à l’océan. Il n’y a rien à faire, rien à fabriquer ou à construire. C’est un processus naturel et l’esprit possède cette capacité à se pacifier de lui-même.

Au lieu de flotter, si notre esprit est trop agité, dès qu’une pensée ou une émotion s’élève, il l’a saisit, y réfléchit intensément, en rajoute d’autres éléments, ce qui l’emmène dans un train de pensées et d’émotions vers toujours davantage de confusion et de mouvement. Alors, il devient lourd, et on ne flotte plus et cette vague nous propulse au lieu de nous pousser légèrement.

De plus, si l’on ne saisit pas la pensée qui s’élève, si on la laisse se déployer et se pacifier, elle révélera les qualités de l’esprit. Celui-ci a la capacité de se reconnaître lui-même pour ce qu’il est, il possède cette capacité créatrice de reconnaissance.

La représentation confuse que l’on a des choses n’est rien d’autre que cette conscience fondamentale de l’esprit voilée par la saisie égoïste. Nous avons en nous le potentiel de clarté, nous possédons cette capacité de l’esprit à se connaître et à connaître les phénomènes directement. On ne peut y accéder qu’en se détendant, en s’arrêtant, en respirant et en lâchant prise. Cette capacité est là depuis toujours, mais n’est pas reconnue à cause de l’ignorance. Donc, s’entrainer mentalement, c’est tout d’abord se détendre, regarder ce qu’est l’esprit, respirer, avoir le courage de laisser son esprit se rencontrer lui-même.

La pratique de l’entrainement mental

Si l’on souhaite obtenir des effets durables de l’entrainement mental, il est nécessaire de s’y mettre avec régularité. Il ne s’agit pas de le faire longtemps,  mais idéalement souvent ; le matin, le soir, régulièrement. Une trop longue période d’entrainement peut parfois renforcer la distraction. De courtes sessions permettent de trouver la fraîcheur et la nouveauté de l’esprit. On a beaucoup d’occasions, les files d’attentes, les déplacements, les embouteillages…

Sans jugement, sans intervention, l’esprit de la personne qui s’entraine est comme l’espace, potentiellement sans entrave, tout peut y prendre place parce que tout est là, tout est en nous.

On ouvre et on détend l’esprit, on le simplifie. Tout va alors s’élever, prendre place et ainsi se libérer.

Puis doucement, suite aux entraînements, l’attention se porte sur le moment présent. Dans cet état, il n’y a pas de jugement, pas de passé, pas de futur, pas de pensées incessantes. L’esprit est simplement là, dans le silence et le calme.