Le poète chinois

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Je ne peux rien te donner qui n’ait déjà son existence à l’intérieur de toi.

Je ne peux te proposer d’images que les tiennes.

Je t’aide à rendre visible ton propre univers.

C’est tout…

*

On n’en finit pas de se cramponner à ce qui nous est cher et l’on croit que c’est de la fidélité, alors que c’est simplement de la paresse.

*

Cher monsieur Calwer, on ne va pas bien loin avec une pareille pensée. Tromperie, n’est qu’un mot. Vous pouvez le remplacer par mythe, religion, pressentiment, conception du monde. Qu’est-ce qui existe réellement? Vous, moi, la maison, le village? Pourquoi? Ces énigmes sont insolubles, naturellement, mais sont-elles donc si importantes? Nous avons le sentiment de notre existence, notre corps se heurte à d’autres corps et notre raison vient buter sur des énigmes.  Il ne s’agit pas d’abattre la muraille. Le doute sur la réalité des choses est un état d’esprit dans lequel on peut persister, mais c’est ce que l’on ne fait pas lorsqu’on se met à penser. Car la pensée n’est pas persistance, mais mouvement. Et pour nous l’important n’est pas de résoudre les questions reconnues comme étant insolubles.

Oui, mais une fois admise l’impossibilité d’expliquer le monde, à quoi bon exercer encore sa pensée?

A quoi bon? Pour faire ce qu’il est possible de faire. Si chacun voulait se resigner ainsi, nous n’aurions pas eu de Copernic, ni de Newton et point de Platon ni de Kant non plus. Vous ne parlez pas sérieusement, j’en suis sûr.

*

Ce n’est pas facile de planter convenablement un jardin. C’est aussi difficile que de gouverner un royaume. On doit se résoudre à aimer même les imperfections, sinon on va au-devant de grandes déceptions.

*

Là où la solitude est nécessaire, elle vient d’elle-même, on n’a pas besoin de l’appeler.

Hermann Hesse dans Le poète chinois

Une pièce musicale de Guzheng – Spring River Flower Moon Night