La pensée du Jnana Yoga n’est donc pas celle de la spéculation ordinaire qui divise à l’infini, s’effrite dans des mots sans contenu, dessèche et asservit. Elle est une pensée qui se recueille, se dépouille, se subtilise progressivement pour faire place au silence. Une pensée qui se sublime et devient intuition.

Comme le dit Shankara, la pensée est comme le vent : c’est lui qui amène les nuages qui voilent le soleil, et c’est lui aussi qui les chasse.

Ces deux sortes de pensées correspondent dans l’ordre de la connaissance à deux modes d’approche de la « vérité », deux manières de réfléchir le monde : l’une extérieure, objective, l’autre intérieure et subjective.

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C’est-à-dire que pour le Védanta comme d’ailleurs pour le Bouddhisme Mahayana, toute question doit être examinée du point de vue de la conscience spectatrice. Seul existe ce qu’elle voit, sent, éprouve. Car finalement l’univers n’a aucune existence en soi en dehors d’un sujet percevant.

Dans cette perspective, le corps n’est pas un ensemble de muscles, d’os et d’organes, mais une simple sensation, puisque c’est ainsi qu’il se révèle pour le sujet qui tente de l’appréhender « de l’inté­rieur ». De même une émotion n’est pas un processus physico-chimique quantifiable, mais un ressenti.

Ce qui ne veut pas dire que le champ d’investigation de la science est faux. Simplement, il n’est pas le même. Les spéculations sur les quanta ou la relativité au même titre que celles sur Dieu ou les Dieux n’entrent pas dans le cadre d’une telle quête.

Et il ne faut pas oublier que la plupart des doctrines orientales ou même des philosophies comme celles de Kant demeurent inaccessibles à beaucoup de nos contemporains précisément parce qu’ils ne peuvent pas se placer dans cette perspective. Ils sont tellement imprégnés par la mentalité « objectivante » qui prédomine à notre époque qu’elle fait partie intégrante de leur être.

Erik Sablé dans La méditation selon la voie de la connaissance

Une pièce musicale de Andreas Vollenweider – May Green Be The Grass