L’histoire de l’homme qui perdait pas à pas

 

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Il se souvenait de l’époque pas si lointaine ou il marchait seul sur un sentier et qu’il portait sur lui tant de richesse. Ce jour était maintenant dévolu.

Il se revoit marchant tout doucement, puis sans raison apparente, la montre à son poignet qui valait une fortune s’était arrêtée. Il avait voulu consulter l’heure, et il, mais il avait plutôt constaté son infortune. Non seulement sa montre était maintenant à ses yeux sans valeur, mais il était sans repère dans le temps.

Il se revoyait reprendre sa marche un peu contrariée. Il se souvenait que c’était alors qu’il s’était rendu compte qu’il avait perdu aussi son chapeau. Probablement un vilain tour que lui avait joué le vent. Il se revoyait regarder le soleil qui lui tapait sur la tête et prendre conscience de son infortune.

Il se souvenait qu’il commençait à être fatigué, mais il voulait maintenir l’allure. Il voulait se rendre le plus rapidement possible à l’autre bout du sentier.

Il se revoyait mettre la main dans sa poche et à sa grande surprise, se rendre compte qu’il n’avait plus de porte-monnaie. Il se revoyait s’arrêter et regarder autour de lui, avec anxiété, fouillant dans toutes ses poches, mais rien à faire. Il n’avait plus son porte-monnaie, donc son argent, ses cartes, et la preuve de son identité. Il se revoyait regarder partout autour de lui. Quelque chose de bizarre se passait sur ce sentier. Il était en train de tout perdre. Au début, il se rappelle qu’il ne se posait pas trop de questions, mais l’angoisse est apparue.

Il se souvenait d’avoir repris sa marche avec un pas plus rapide, car son but était de sortir de ce sentier dans les plus brefs délais. Il se rappelait qu’il n’avait plus la notion du temps, il ne pouvait plus se protéger la tête et il avait perdu beaucoup de lui-même. Il ne savait pas où il était, mais il savait qu’il devait avancer.

Il se rappelait clairement que soudain, il eut un grand frisson, et l’apparition de cette sensation de froid. Il se revoyait s’être arrêté, puis regarder ses jambes, sa poitrine et enfin tout son corps, et prendre conscience qu’il était nu. Tous ses vêtements avaient disparu. Plus aucune défense contre le monde extérieur.

Il se rappelait d’avoir entendu des pas et voir tout à coup un homme surgir devant lui et avancer d’un bon pas. Se sachant nu, il avait eu un mouvement d’arrêt puis de léger recul. Il se rappelait cette honte qui l’avait soudain habité ainsi que de cette nouvelle peur. L’homme avait passé près de lui, lui avait souri et demandé si tout allait bien. Il se revoyait répondre oui et laisser l’homme continuer sa route.

Il se revoyait courir à perdre haleine. Tout tournait dans sa tête, il lui semblait que tous ses points de repère avaient disparu. Il se rappelait très bien cette sensation d’avoir le fond de son être, et tout à coup, de s’être arrêté, car il savait qu’il avait parcouru tout le sentier, qu’il était arrivé.

Il se revoyait consulter sa montre en riant, remonter son chapeau, ajuster son habit et s’en retourner chez lui. Il rouvrit les yeux et contempla quelque instant une fleur devant lui dans le vase, son appartement était paisible, il s’avait qu’il venait d’éclore, il s’avait qu’il venait de découvrir ou se situait sa vraie richesse.

La quête de soi ne se fait pas dans un grand calme, mais plutôt par un chemin ou l’on devient prodigieusement vivant. Le sentier lui a fait perdre ses repères, ses avoirs pour lui permettre d’être.

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