Perles de verre

Cœur, quand la vie t’appelle,

Sois paré à partir et à recommencer,

Cours, vaillant, sans regret,

Te plier à des jougs nouveaux et différents.

En tout commencement un charme a sa demeure,

C’est lui qui nous protège et qui nous aide à vivre.

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La gaieté n’est ni légèreté, ni complaisance envers soi-même, mais le plus haut degré de la connaissance et de l’amour, la lucidité au bord de tous les abîmes.

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Il avait déjà fait personnellement l’expérience que la foi et le doute vont de pair, qu’ils se conditionnent l’un l’autre, comme l’inspiration et l’expiration.

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Cette sérénité n’est faite ni de badinage, ni de narcissisme, elle est connaissance suprême et amour, affirmation de toute réalité, attention en éveil au bord des grands fonds et de tous les abîmes; c’est une vertu des saints et des chevaliers, elle est indestructible et ne fait que croître avec l’âge et l’approche de la mort.

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Les choses se déforment facilement quand on regarde en arrière.

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L’enjeu de l’éveil, c’était, semblait-il, non la vérité et la connaissance, mais la réalité, le fait de la vivre et de l’affronter. L’éveil ne vous faisait pas pénétrer près du noyau des choses, plus près de la vérité. Ce qu’on saisissait, ce qu’on accomplissait ou qu’on subissait dans cette opération, ce n’était que la prise de position du moi vis-à-vis de l’état momentané de ces choses. On ne découvrait pas des lois, mais des décisions, on ne pénétrait pas dans le cœur du monde, mais dans le cœur de sa propre personne. C’était aussi pour cela que ce qu’on connaissait alors était si peu communicable, si singulièrement rebelle à la parole et à la formulation. Il semblait qu’exprimer ces régions de la vie ne fît pas partie des objectifs de langage.

Hermann Hesse dans Le Jeu des perles de verre

Une pièce musicale de Montreal Guitar Trio – The Glass Beads (Les Perles de verre)

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