Ruines du ciel

Dans ce rêve une jeune aristocrate posait son pied joliment chaussé sur la première marche d’un échafaud. Je lui disais connaître un moyen pour empêcher la mort proche de la saisir : tous nos malheurs venant de ce qu’une part de notre âme errait dans le passé tandis que l’autre titubait dans l’avenir, il suffirait d’habiter l’instant présent dans sa plénitude pour que la mort ne trouve plus notre porte – la profonde conscience d’être vivants nous rendant éternels.

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Ne pas chercher son intérêt mais l’intérêt de ce qu’on voit est la formule de l’esprit.

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Ils marchent en projetant devant eux, à moins d’un mètre, l’idée qu’ils se font d’eux-mêmes : leur âme arrogante ou craintive leur ouvre le chemin. Le saint est celui qui avance précédé par la seule idée qu’il se fait de Dieu – un amandier en fleur qui vient à notre rencontre.

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Si nous avions le dixième de l’attention qu’a le chat pour le vol de la mouche – le monde serait sauvé.

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J’emmène parfois une trousse de commis voyageur aux enfers, j’y passe une nuit ou une minute puis je reviens, mais je connais bien ce lieu qui donne sa densité à l’émerveillement de vivre.

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Toutes notre vie n’est faite que d’échecs et ces échecs sont des carreaux cassés par où l’air entre

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Chaque jour a son poison et, pour qui sait voir, son antidote.

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Il faut chercher en tout l’innocence – on finira par l’y trouver.

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L’honnêteté et la patience sont les racines du ciel.

Christian Bobin dans Les ruines du ciel

Christian Bobin né le 24 avril 1951 et mort le 23 novembre 2022 est un écrivain et poète français. Il est un auteur qui a surtout exploré les voies qu’offraient l’émerveillement par la nature, par le vide et par les petites choses de la vie.

Les ruines du ciel explore la possibilité de retrouver dans les ruines de la société actuelle les signes d’une vie heureuse, et d’un retournement toujours possible.

Une pièce musicale de Debussy interprétée par Lugansky – Jardins sous la pluie

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