Philosophie de la marche

Aucune de vos connaissances, votre lecture, vos connexions ne seront d’aucune utilité ici : deux jambes suffisent, et de grands yeux pour voir avec. Marchez seul, à travers les montagnes ou à travers les forêts. Vous n’êtes personne pour les collines ou les branches épaisses lourdes de verdure. Vous n’êtes plus un rôle, ou un statut, pas même un individu, mais un corps, un corps qui ressent des pierres tranchantes sur les chemins, la caresse de l’herbe longue et la fraîcheur du vent. Quand tu marches, le monde n’a ni présent ni futur : rien que le cycle des matins et des soirs. Toujours la même chose à faire toute la journée : marcher. Mais le marcheur qui s’émerveille en marchant (le bleu des rochers dans une lumière du soir de juillet, le vert argenté des feuilles d’olivier à midi, les collines violettes du matin) n’a pas de passé, pas de projets, pas d’expérience. Il a en lui l’enfant éternel. En marchant je ne suis qu’un simple regard.

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La marche fait coïncider l’âme, le corps et le monde.

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Il n’y a pas de meilleure façon de marcher. Chacun a sa manière de mettre un pied devant l’autre, de déambuler dans les rues ou d’arpenter les sentiers. On reconnaît d’ailleurs souvent un proche autant à son pas qu’à sa voix. Acte naturel de l’espèce humaine, la marche est toutefois non seulement une pratique, mais un acte social, et parfois même un souci éthique ou un geste politique.

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Sur les sentiers, dans les ruelles et les passages, parce que la traversée est autant le but recherché que le point d’arrivée mais aussi parce que « à pied, on peut passer partout, même dans les sylves les plus denses », explique Jacques Lacarrière (Chemin faisant, Fayard, 1977), il n’y a pas de chemins qui ne mènent nulle part.

Dirigé par Nicolas Truong dans Philosophie de la marche

Une pièce musicale de Tchaikovsky – Marche Slave par Auckland Philharmonia Orchestra

2 réflexions sur “Philosophie de la marche

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