Singerie

La libellule, qui voletait au-dessus du billot, vit la viande rouge, descendit en planant et s’y posa, au moment même où s’abattait le couperet du boucher.

Le couperet la coupa en deux.

Une moitié du corps tomba sur le sol, devant la fourmi. Celle-ci traîna le cadavre jusqu’à son nid, tout en se récitant :

« Son plan s’arrête là, le mien continue. « Qu’elle suive son plan », cela est terminé ; « je suis le mien », cela marque le commencement d’un nouveau cycle. La suffisance semblait chose importante, c’était chose éphémère. Toute sa vie, elle a mangé ce dont elle avait envie, pour finir par être mangée.

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Un singe vit à travers le verre transparent d’une bouteille une cerise et voulut la voler. Il passa sa main à travers le col de la bouteille et referma le poing autour de la cerise, mais il ne pouvait plus retirer la main. Survint alors le chasseur qui avait posé le piège. Le singe était si gêné par cette bouteille qu’il ne put pas s’enfuir et fut capturé. « Au moins, il me reste la cerise dans la main », se dit-il. Mais au même moment, le chasseur le frappa d’un coup sec au coude, la main du singe s’ouvrit et glisser hors de la bouteille. Ainsi, le chasseur avait maintenant le fruit, la bouteille et le singe.

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La question n’est pas de savoir si une chose est arrivée ou non. Tout peut arriver. Ce qui compte, c’est la signification de l’événement.

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Voici enfin que j’apprends, dit Yunus, que la compréhension d’un homme est fonction de son aptitude à comprendre.

Idries Shah dans Contes derviches

Une pièce musicale de Dervish – The Swallow’s Tail