Silences

Le pont

Vague est le pont qui passe à demain de naguère

Et du milieu de l’âge on est des deux côtés

Le mur ne fait pas l’ombre et n’est pas la lumière

Qu’on appelait l’hiver qu’on nommera l’été

Il n’est pierre de moi qui dorme quand tu danses

Chacune est une oreille et chacune te voit

Ton immobilité me tient lieu de silence

Et chacun de tes mots tombe à l’envers de moi

Je dis à mots petits de grands espaces d’âge

Qui font en leur milieu croire qu’il est midi

J’ai peur d’être le pont qui prend pour son voyage

Le voyage de l’eau entre ses bras surpris

Il va neiger tantôt d’une neige si calme

Sur des rives de moi où j’hésite à courir

Que je m’attache à tout ce qui me semble halte

Sur la courbe attelée aux chevaux de mourir

*

L’arbre qui bouge

L’arbre qui bouge et fait

Semblant que c’est le vent.

L’homme qui parle et fait

Semblant que c’est lui-même.

*

Dites-lui

Quelqu’un était ici.

Quelqu’un s’en est allé

Pour chercher un pays

Dont nul n’avait parlé.

En buvant de la bière,

Il s’en est souvenu,

Puis il a disparu

Par le chemin de pierre.

S’il passe à votre porte

Dites-lui que naguère

J’ai perdu de la sorte

Une île et deux rivières

À poursuivre ces terres

Que l’horizon transporte.

*

Un jour je partirai à la recherche de mon pays géant, à la grande quête des plaines, à perte de vie, et de toute cette langue de nuit qui m’attend, depuis tant d’aurores, tant de soirs aux soleils brisés, la Route.

Gilles Vigneault (1928) est un poète et un auteur-compositeur-interprète québécois. Deux de ses fils sont écrivains: le poète et parolier François Vigneault et le romancier et scénariste Guillaume Vigneault.

Gilles Vigneault dans Silences

Une pièce musicale de Gilles Vigneault – Les silences

Les paroles sur https://lyricsportal.com/titre/83224/les-silences?langue=fr