Stratégie du oui

Que peut le oui ? Rien, s’il est passivité, résignation, répression du non, accablement. Tout, s’il est processus dynamique, vision juste. Tenter d’accueillir l’émotion, de rester quelque temps en sa compagnie ; la voir sans la nier, la reconnaître sans la juger, bien sûr, c’est lui dire oui. Bien sûr, c’est être « un » avec elle.

*

Au lieu de me diviser en la refusant, la refoulant, je l’accompagne. Unifié, je colle toujours au principe de non-dualité. Même si je suis perturbé, en acceptant de l’être, je retrouve mon unité et suis de nouveau en accord avec la vérité non-duelle. Je laisse « l’Enfer » du conflit et regagne mon « Paradis » de tranquillité. Mais – nuance – non d’indifférence qui est le résultat d’un refoulement déguisé en simili d’acceptation, un oui du bout des lèvres. Un refus masqué, en somme.

*

L’indifférence, ou une excessive politesse, camouflent l’émotion en la réprimant. Masques derrière lesquels nous nous figeons pour nous couper de l’émotionnel, sans ne le résoudre ni le transmuer. Si la non-dualité est un principe vrai, il se retrouve partout, également dans nos processus psychiques. C’est précisément pourquoi dès qu’apparaît, dans notre monde intérieur, la moindre division ou la plus mince hésitation, il en résulte une gêne obscure nous servant de signal : « Attention – Déviation ». Nous ne sommes plus dans la vérité.!

*

Calme ou tendu, heureux ou perturbé, beaucoup de circonvolutions avant de parvenir, en toutes circonstances, à garder un point fixe – comme le derviche tourneur maintient en lui, même au plus fort du tourbillon un axe d’immobilité tranquille.

Denise Desjardins (1923-2016) fut une femme de lettres et peintre française. Spécialiste de la tradition hindoue, elle fut un disciple du maître indien Swami Prajnanpad.

Denise Desjardins dans La stratégie du oui

Une pièce musicale de The Tragedy of Ignorance – Simon Daum

Laisser un commentaire