Vivre dans un monde en crise

Qu’est-ce qu’un être humain, vous par exemple, pouvez faire dans un monde si divisé ? Divisé entre l’extérieur et l’intérieur, le conscient et l’inconscient, le riche et le pauvre, l’érudit et l’ignorant, le technicien et le profane, l’artiste, l’homme d’affaires, le hippie aux cheveux longs, aux cheveux courts. Que peut-on faire lorsqu’on est conscient de cela ? Vous posez-vous cette question en passant, en supposant que tout cela cessera dans quelques milliers d’années et que cela dépend donc de l’environnement, des systèmes politiques, etc. ? Ou alors est-ce un problème qui requiert de votre part une attention, une action immédiate, autrement dit, est-ce qu’il vous préoccupe au point que vous vouliez y impliquer tout votre être pour le résoudre ? C’est pourquoi nous avons demandé où se trouve votre intérêt. Êtes-vous conscients de la division qui règne entre les êtres humains depuis des millénaires, non seulement à l’extérieur de vous mais aussi en chacun de nous, divisé en lui-même, en conflit avec lui-même, en lutte avec lui-même, pour devenir, pour être, se réaliser, s’affirmer, dominer ?

La question est donc celle-ci : que doit-on faire, comment peut-on agir ? Miser sur une action collective ou bien sur une réponse issue de la liberté propre à l’être humain et, dans cet état de liberté, agir ensuite à un niveau collectif ? Nous devons agir collectivement car de grands changements sont nécessaires, mais une révolution psychologique en profondeur est essentielle, non pas une révolution qui consiste à jeter des bombes et à tuer des milliers de personnes au nom de l’ordre, d’une nouvelle société ou de la paix. La nécessité d’une profonde révolution psychologique de cet ordre n’est pas une affirmation dogmatique de l’orateur ; elle est indispensable, l’observation le prouve. Est-ce qu’une action collective peut induire une telle révolution, c’est-à-dire par le biais de l’éducation, du conditionnement, obliger l’individu, l’être humain à se conduire convenablement ? C’est ce qui se fait au détriment de la liberté totale de l’individu, même si cela conduit à une action collective. Ou alors est-ce que la révolution consiste à libérer l’esprit de son conditionnement et, dans cette liberté, amener une coopération dans l’action ? Est-ce que je me fais bien comprendre ?

Donc, nous ne sommes pas en train d’opposer l’individuel et le collectif puisque le monde est divisé ainsi, ni d’insister sur la liberté de l’individu qui lui permettrait de faire ce qu’il veut, ou de vanter une action collective qui étoufferait l’individu. Nous parlons de quelque chose de radicalement différent, qui n’est ni ceci ni cela.

Jiddu Krishnamurti (1895-1986) : Il fut un libre penseur, qui s’est promené dans le monde. Il est considéré comme l’un des grands penseurs et maîtres spirituels. Il ne proposait aucune philosophie ou religion. Il expliquait avec minutie les subtils mécanismes de l’esprit humain, et il insistait sur la nécessité d’introduire une qualité profondément méditative et spirituelle dans notre vie de tous les jours. Il n’appartenait à aucune organisation, aucune secte, à aucun pays, ne s’inscrivait dans aucun courant de pensée, politique ou idéologique. Il affirmait tout au contraire que ce sont là les véritables facteurs qui divisent des hommes et entraînent les conflits et les guerres. Citation : Ce que je vous demande, c’est d’ouvrir votre esprit, non de croire.

Jiddu Krishnamurti dans Vivre dans un monde en crise – Ce que la vie nous enseigne en ces temps difficiles

Une pièce musicale de Mike Oldfield – Crises