Protocole chaos

Nous imaginons un grand n’importe quoi et, à force de le dire, et de le dire un nombre incalculable de fois à des gens qui ne s’informent que par les réseaux sociaux, ils commencent à croire à ce grand n’importe quoi.

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— Le problème central réside, on vient de le voir, dans les algorithmes, conclut-il. Mais, attention, ça ne retire rien à la responsabilité que peut avoir la Russie. Ce que Moscou a fait, et est en train de faire, consiste essentiellement à manipuler ce problème systémique de l’intelligence artificielle pour attaquer l’Occident et le faire imploser. C’est pour cette raison qu’ils ont développé le Protocole Chaos, qui n’est rien d’autre qu’une recette permettant d’utiliser ces caractéristiques des réseaux sociaux pour mener une guerre hybride contre les démocraties libérales. La stratégie du Protocole Chaos est simple et s’applique à tout en Occident : l’idée, c’est de trouver des alliés anti-libéraux au sein des démocraties libérales en utilisant les réseaux sociaux, pour identifier des groupes, en appeler à l’identité d’un ou de plusieurs de ces groupes, leur dire que cette identité souffre d’une menace grave fomentée par d’autres groupes et, en ayant recours à un langage moral et émotionnel empreint de vérités et de mensonges, monter les groupes les uns contre les autres, au moyen des réseaux sociaux, dans le but d’exacerber et d’approfondir les divisions au sein de la société occidentale, jusqu’à la fracturer, l’affaiblir… et, enfin, la renverser. Voilà à quoi s’emploie la Russie.

— Donc ils utilisent la démocratie et la liberté pour détruire la démocratie et la liberté, en conclut l’Américain.

— Derrière tous les mouvements identitaires qu’on voit en Occident, il y a la main de la Russie qui les aide et les encourage : le Brexit, le référendum néerlandais de 2016, le séparatisme écossais d’origine nationaliste et socialiste, le séparatisme catalan d’origine nationaliste et socialiste, le nationalisme français, le socialisme et le nationalisme néerlandais, le nationalisme allemand, le nationalisme suédois, le discours anti-immigration, le discours anti-européen, le discours raciste, le discours anticapitaliste, le radicalisme woke… partout où il peut y avoir une division identitaire, on trouve les Russes. Eux et leurs chevaux de Troie, les alliés nationalistes et socialistes antilibéraux qui, en Occident, œuvrent eux aussi à la destruction de l’Occident. Trump n’est que l’atout d’un jeu qui compte énormément de cartes, des cartes de plusieurs couleurs, de même que d’idéologies autour de tout ce qui est susceptible de saper les fondements de la démocratie libérale. Vous pouvez être certain que si Trump s’en va, un autre Trump viendra, car il y a de nombreux Trump partout dans le monde, du nationalisme au socialisme, des théocraties au tribalisme, dans tout ce qui est antilibéral. Trump n’est qu’un nom, un acteur, un visage qui interprète une stratégie. Trump, ce sont tous les pions à l’œuvre contre la démocratie libérale dans l’ensemble du monde occidental. Mais le véritable jeu est manipulé à distance, le scénario s’écrit à Moscou et dispose des algorithmes de l’Occident pour les retourner contre lui. Le scénario, c’est le Protocole Chaos, le programme russe qui vise à détruire l’Occident au moyen des réseaux sociaux. Les antilibéraux plantent les semences, les algorithmes les répandent dans le vent.

José Rodrigues dos Santos dans Protocole chaos

Une pièce musicale de Max Cooper – Order From Chaos (official video by Maxime Causeret