2001 : L’Odyssée de l’espace

ImAGE soleil

C’était le propre du barbare de détruire ce qu’il ne pouvait comprendre, mais peut-être les hommes n’étaient-ils que des barbares comparés aux êtres qui avaient érigé les monolithes…

Et d’où avaient-ils pu venir ? De la Lune même ? C’était tout à fait impossible. S’il y avait jamais eu la moindre trace de vie sur ce monde désolé, elle avait été détruite durant la période de formation des cratères, quand la surface avait été chauffée à blanc.
De la terre ? Hautement improbable mais pas impossible. Mais une civilisation terrestre avancée – peut-être non humaine – au Pléistocène, aurait laissé d’autres traces de son existence. Nous les aurions découvertes bien avant de débarquer sur la Lune, se dit Floyd.

Cela laissait deux possibilités: les autres planètes et les étoiles. Pourtant, l’évidence était contre la présence de la vie, de toute forme de vie, dans le système solaire, en dehors de la Terre et de Mars. Les mondes intérieurs étaient trop chauds, ceux de l’extérieur trop froids, à moins de descendre à des profondeurs où la pression atteignait des centaines de tonnes au centimètre carré.

Alors les visiteurs étaient peut-être venus des étoiles, ce qui paraissait encore plus incroyable. En levant les yeux vers les constellations, Floyd se rappela combien de fois ses collègues avaient prouvé l’impossibilité des voyages interstellaires.

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Derrière chaque être vivant il y a trente fantômes, car tel est le rapport des morts aux vivants. Depuis l’aube des temps, environs cent milliards d’êtres humains ont vécu sur cette planète.

Et ce nombre est très intéressant car, par une curieuse coïncidence, il existe environs cent milliards d’étoiles dans notre univers local, la Voie Lactée. Ainsi pour chaque homme qui vécu jamais , une étoile brille dans l’espace.

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Parfois, Floyd se demandait si le minibloc et la technologie fantastique qu’il supposait représentaient le sommet des découvertes humaines en matière de communications. Il se trouvait en plein espace, s’éloignant de la Terre à des milliers de milles à l’heure et pourtant, en quelques fractions de seconde, il lui était possible de consulter n’importe quel journal. Le mot même de journal était une survivance anachro nique en cet âge électronique. Le texte se modifiait automatiquement d’heure en heure. Même en ne lisant que la version anglaise on pouvait passer sa vie entière à absorber le flot sans cesse changeant des informations retransmises par satellites.

Il était difficile d’imaginer que le système pût être modifié ou amélioré. Pourtant, songea Floyd, tôt ou tard il disparaîtrait pour être remplacé par quelque chose qui renverrait les miniblocs au rang des presses de Gutenberg.

La lecture des journaux électroniques amenait souvent une autre réflexion : plus les moyens de diffusion se faisaient merveilleux, plus barbare, atterrant et choquant était leur contenu. Accidents, désastres, crimes, menaces de conflit, éditoriaux sinistres – tels semblaient être les sujets principaux des articles qui se propageaient dans l’espace. Floyd en venait parfois à se demander si tout cela était vraiment aussi terrible qu’il y semblait. Les informations d’Utopie, après tout, auraient sans doute été atrocement ennuyeuses

Arthur C. Clarke dans 2001 : L’odyssée de l’espace ( Stanley Kubrick en a fait un film)

Une pièce musicale  Also Sprach Zarathustra  de Richard Strauss utilisé comme générique pour le film 2001 Odyssée de l’espace