Jung et la gnose

Ce qui résonne à travers ces quelques figures majeures de la gnose telle que l’a revisitée Jung est toujours l’appel à une conscientisation de l’être humain, en son fond bien proche de l’appel à l’éveil et à la reconnaissance de son vrai « soi » lancé par les gnostiques : insubordination face à toute institution privant l’individu du droit sacré de « devenir soi » ; refus de voir la foi supplanter la connaissance quand elle n’est pas source de transformation psychologique et d’épanouissement spirituel ; conception novatrice de l’éthique et vision de l’unité du monde qui, si elle n’est pas pleinement pléromatique, bouleverse le rapport au monde au moins autant que la révélation gnostique. Car c’est bien en terme de « conscience » – jamais assez ample ni assez profonde – que Jung a traduit la notion gnostique de « lumière » dont les mille et une nuances, déclinées par la plupart des textes anciens, mettaient en valeur la plénitude indicible du plérôme. Jung aurait pu en ce sens faire sienne, ou prêter à la psychologie analytique dont il fut l’initiateur inspiré, la proclamation des pérates rapportée par Hippolyte, son hérésiologue préféré :

« Je suis la voix du réveil dans le temps de la nuit. Je commence maintenant à désarmer la puissance qui vient du chaos. C’est la puissance du limon de l’abîme, la puissance qui fait remonter la boue de l’immortel et immense élément humide, la puissance entière de l’agitation violente, puissance couleur d’eau, toujours en mouvement ; c’est cette puissance qui porte ce qui demeure, retient ce qui tremble, libère ce qui va, soulage ce qui gémit. » (Philosophumena, V, 14).

Françoise Bonardel dans Jung et la gnose

Une pièce musicale de PACHELBEL – CANON in D major- ELEGANCE