L’Odyssée du sacré

Nous avons peu d’indices sur ce qui pourrait être les premières traces d’un sentiment du sacré ou d’une religiosité lors du Paléolithique – l’apparition des sépultures ou l’art pariétal par exemple –, même s’il est fort probable que nos lointains ancêtres croyaient en des forces invisibles de la nature. Un premier grand tournant a lieu lors du passage du Paléolithique au Néolithique, lorsque sapiens quitte son mode de vie nomade pour se sédentariser. Les humains se sont alors progressivement détournés des esprits de la nature, avec lesquels ils communiquaient, pour rendre un culte aux ancêtres, puis aux dieux et aux déesses de la cité.

Un second moment advient avec l’invention de l’écriture et la formation des civilisations, et voit naître les grandes religions polythéistes antiques avec l’avènement des codes moraux et du patriarcat, ainsi que l’apparition des rituels sacrificiels, des récits mythiques et la distinction entre un monde sacré et un monde profane.

Vient ensuite, vers le milieu du Ier millénaire avant notre ère, ce que le philosophe allemand Karl Jaspers appelle l’« âge axial de l’humanité », durant lequel se produit, au cœur de la plupart des grandes civilisations, une véritable révolution spirituelle, liée au développement de la conscience individuelle et de la raison critique au sein de couches cultivées de la population : Upanishads, jaïnisme et bouddhisme en Inde ; confucianisme et taoïsme en Chine ; grandes écoles de sagesse philosophique en Grèce ; zoroastrisme en Perse et prophètes d’Israël, jusqu’à, beaucoup plus tard, Jésus et Muhammad au Proche-Orient.

Dernier grand tournant historique, enfin, celui de la modernité à partir de la Renaissance, qui bouleverse progressivement les modes de vie des humains à mesure que progressent l’individualisation, la globalisation du monde et l’esprit critique, d’où naîtront la science, le capitalisme et un nouvel essor technologique. Ces derniers bouleversements ont un impact décisif sur la spiritualité et la religion : sécularisation, atomisation du croire, spiritualité à la carte, mais aussi réactions religieuses identitaires et nouvelles quêtes de certitudes. Nous nous demanderons enfin en conclusion de cet ouvrage si l’humanité ne serait pas en train de vivre un cinquième grand tournant, avec la crise écologique et le bouleversement de nos modes de vie liés à l’avènement du numérique, de l’intelligence artificielle et du transhumanisme ? Quelles peuvent être les conséquences de cette nouvelle révolution culturelle et sociale sur notre manière de concevoir et de vivre le sacré ?

Frédéric Lenoir (1962) est philosophe, sociologue, historien des religions, conférencier et écrivain. Existe-t-il une expérience plus désirable que celle de la joie ?

Ce livre de Frédéric Lenoir, fruit de plus de trente années de recherches, nous raconte, dans un langage simple et accessible, la prodigieuse histoire d’Homo spiritus et du sacré, de la Préhistoire à nos jours.

Frédéric Lenoir dans L’Odyssée du sacré – La grande histoire des croyances et des spiritualités des origines à nos jours

Une pièce musicale de Kitaro – Heaven and Earth