L’été de la sorcière

Elle a éteint le feu et, tout en continuant de remuer le contenu de la casserole :

– il est normal de se sentir blessé. On n’y peut rien. Et comme c’est dans ta nature, tu n’as pas d’autre choix que de faire avec, a-t-elle déclaré lentement, délicatement, comme si elle déroulait un fil de soie hors d’elle….

Peu importe ce qui se passera, il faudra te convaincre que cette blessure ne sera pas mortelle. Ainsi, et même si sur le moment tu es incapable d’y croire, des graines auront été semées, et quelque part dans ton corps et dans ton cœur germera une nouvelle force de vie.

Cette blessure ne sera pas mortelle.

J’ai reçu bien des coups que j’aurais du considérer comme fatals, mais à chaque fois, je suis restée fidèle à la pensée de ma grand-mère, que prononçais à la manière d’une formule magique. Cette blessure ne sera pas mortelle. Même lorsque se succédaient les jours où il me paraissait impossible de me lever, ces mots, pareils à la lumière douce et chaleureuse de cet après-midi d’hiver, continuaient à être absorbés par la terre gelée à cœur.

Cela ne pourra jamais me détruire.

Cela ne pourra jamais te détruire.

*

– Alors être sorcière, ça veut dire s’entraîner à mourir alors qu’on est encore en vie ?
– Tout à fait. S’entraîner à mourir pour vivre pleinement.

*

L’âme ne peut faire l’expérience de la vie qu’à travers un corps, et c’est seulement grâce à ces expériences qu’elle peut grandir. C’est pourquoi vivre en ce monde est une chance inespérée pour elle. Car l’opportunité de grandir lui est donnée.

Nashiki Kaho dans L’été de la sorcière

Une pièce musicale de Witch’s Fiddle by Robert Buckley