L’Oiseau respirable

Je crois que j’écris pour écouter ce que disent les mots

quand ils ne parlent plus. Je crois qu’on ne peut rien oublier

tant qu’on ne s’est pas souvenu de tout. Et justement,

n’écrit-on pas pour oublier tout ce que la mémoire a écrit en

nous comme, finalement, l’on ne vit que pour bien se

convaincre de ne plus vouloir vivre?

par l’oreille et puis l’œil entrent les mots

par la bouche et puis la main sortent les mots

par le nez entre et sort le ciel

aucun arbre n’est dur de la feuille

même si souvent il respire ce que nous expirons

la poésie est la fleur entre les feuilles et le fruit

pourquoi écrire si nous ne savons pas lire?

comment mourir si nous ne sommes pas?

*

Il est avantageux de commencer l’alphabet par la dernière lettre pour découvrir que la première n’est pas la dernière mais celle après.

*

entre le dire et le faire

beaucoup en ont dit trop sans le faire

beaucoup en ont trop fait sans le dire

je propose que l’on s’arrête

que l’on fasse l’arbre

en attendant le prochain oiseau

pour lui donner nos yeux

même si comme dit un Pilote :

les oiseaux ne prennent pas la liberté

qu’on rêve qu’on prendrait

si on avait des ailes

je crois tout aussi bien que les humains

ne prennent pas la liberté à laquelle

les oiseaux n’ont pas besoin de rêver

puisqu’ils ont été gratifiés d’ailes

José Acquelin est un poète québécois né à Montréal, le 4 avril 1956 de parents occitans. Les poèmes de José Acquelin se forment d’abord dans le regard curieux, presque naïf que le poète pose sur ce qui l’entoure : «je suis pur parce que je suis rien».

José Acquelin dans L’Oiseau respirable

Une pièce musicale de René Aubry – Demi Lune