La rose retrouvée

Il y avait une vague sur l’océan. Elle roulait, profitant de la chaleur du soleil et de la vitesse du vent. Elle souriait à tout en suivant son chemin vers la rive. Puis, soudain, elle remarqua que les vagues qui la précédaient se brisaient une à une contre les rochers. « Mon dieu, se dit-elle, je vais finir comme elles. Je vais bientôt m’écraser contre un roc et disparaître. » Une autre vague qui passait perçut l’état de panique dans lequel elle se trouvait et lui demanda : « Qu’est-ce qui t’arrive ? Pourquoi es-tu si triste ? Regarde-moi ce temps magnifique ! vois ce soleil, ce vent qui nous pousse et ces mouettes qui volent au-dessus de nous ! » La première vague répondit : « Mais ne vois-tu pas ces vagues devant nous qui disparaissent en se cognant violemment contre la falaise ? C’est terrible ! Nous allons bientôt finir comme elles. » « Mais tu ne comprends pas, répliqua la seconde vague. Tu n’es pas une vague. Tu fais partie de l’océan. »

*

Il n’y a rien de grand en moi. Mais je suis une rose… Qu’on m’admire ou non, qu’on se jette à mes pieds ou non, je demeure une rose… Je ne suis rien de grand. Juste une rose… Mais sais-tu seulement ce que c’est que d’être une rose, mon amie ? Être une rose signifie être libre, ne pas exister par les louanges des autres ou ne pas cesser d’exister sous le poids de leur désapprobation. Ne te méprends pas : j’aime les gens, moi aussi. J’aime qu’ils me voient et respirent mon parfum. Mais je ne souhaite cela que dans la mesure où je peux leur offrir mon parfum.

*

Mais ne confonds jamais ces gens-là avec ceux qui sont venus au temple pour t’adorer.

*

Tant que le temps coule, l’avenir qui nous émerveille tellement n’est rien d’autre qu’un passé vierge.

Serdar Ozkan (1975- ) est un écrivain turc. Avec « La rose retrouvée », il est devenu l’un des auteurs les plus traduits dans l’histoire de la littérature turque.

Serdar Özkan dans La rose retrouvée

Une pièce musicale de Jean-Michel Blais – Roses