Une femme libre

Un homme, pour moi, ce n’est ni un portefeuille pour assurer mon existence, ni une étiquette dont j’ai besoin pour circuler dans la société, ni un bijou qu’il m’amuserait de porter pour que d’autres me l’envient, ni un sexe où accrocher mon reste de jeunesse pour la retenir, ni un poste à transistor destiné à combler le silence.

C’est un être humain avec lequel je veux trouver ce qu’il y a de plus rare au monde : un langage commun. Communiquer, s’entendre, être entendu et entendre l’autre.

Ce langage est fait de mots et aussi de gestes, bien sûr. On peut commencer par les gestes ; on peut commencer par les mots ; on peut réussir dans les gestes et pas dans les mots, dans les mots et pas dans les gestes. Dans ce cas-là, c’est raté et c’est affreux, parce qu’il arrive qu’on boite longtemps à deux, au lieu d’avoir le courage de reprendre le chemin seul.

On peut aussi se tromper un temps. Qui de nous ne s’est trompé ? En vous parlant, je me souviens d’un bel imbécile aux yeux verts… Non, je préfère ne pas m’en souvenir. Être absorbée par un homme au corps intelligent et à l’esprit obtus, fût-ce pendant deux mois, c’est la punition suprême.

Quand on a trouvé, il faut encore garder la communication toujours ouverte au niveau le plus profond, et ce n’est pas simple.

Françoise Giroud dans Histoire d’une femme libre

Une pièce musicale de Maurice Ravel – Boléro | Alondra de la Parra | Orchestre symphonique de la WDR