Vivre concients

Vivre conscients n’est pas sans risques, et le recueillement pousse vite au désir de dépouillement, non pour s’appauvrir mais pour s’alléger.

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L’acceptation, finalement, suppose un choix paradoxal : celui de ne pas choisir ! De ne rien rejeter, de ne rien éliminer. Même le « pas désirable », le « pas bon », le « pas beau », le « pas bien ».

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On décide, à l’inverse, de tout accueillir, d’héberger ce qui passe et ce qui est. Par l’acceptation, on ouvre un espace intérieur infini, parce qu’on a renoncé à tout filtrer, à tout contrôler, à tout valider et mesurer et juger. En un sens, accepter, c’est s’enrichir et laisser le monde entrer en nous, au lieu de vouloir le faire à son image, et n’en prendre que ce qui nous convient et nous ressemble. C’est ce que disait à sa manière étrange Thérèse de Lisieux : « Je choisis tout. ».

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L’extase est une sortie de soi et une fusion dans autre chose de plus vaste : une révélation divine, ou parfois charnelle, l’accès à un autre monde que l’habituel, dans un autre état de conscience que l’habituel. Elle est une chute, un saut ou un détour – car, en général, on en revient – dans la transcendance et l’absolu.

L’enstase est une chute en soi-même, et on y découvre que tout est là. C’est la douceur qui monte du dedans, le calme à qui l’on a permis d’émerger de l’intérieur. Tout à coup, éruption volcanique de sérénité. C’est toujours bouleversant de sentir cet apaisement autoproduit. Bouleversant de constater comme le calme enstatique nous relie au monde au lieu de nous en séparer. On se laisse alors transformer, au lieu de vouloir encore et toujours transformer ce qui nous entoure.

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Plutôt que le dépassement (de soi ou, pire, des autres), c’est l’accomplissement qui nous intéresse alors : ne plus penser sa vie en termes de victoires ou de défaites, mais d’expériences qui nous construisent… »

Christophe André est médecin psychiatre dans le service Hospitalo-Universitaire de l’hôpital Sainte-Anne à Paris, spécialiste de la psychologie positive.

Christophe André dans Méditer, jour après jour

Une pièce musicale de Eternal Eclipse – Forgotten Odes