Mettre fin au conflit

La provocation est quasi permanente dans une société qui demande en permanence de choisir, le produit, la technique de méditation, et là, au cœur de la méditation, l’esprit fatigué retombe sur une idée qui se bat contre l’autre, une pensée qui chasse l’autre. Le système (notre système aussi) fonctionne à partir de ces élections momentanées, créatrices d’envie, de jalousie, d’asservissement et surtout de lassitude, d’ennui. Mais pourquoi s’identifier à cette situation ? Moins nous le serons, plus l’esprit sera en repos.

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Tant que persistera cette dualité entre ce qui est et ce qui devrait être — l’homme s’efforçant de devenir quelque chose de différent, faisant des efforts pour atteindre « ce qui devrait être » — ce conflit sera cause d’un gaspillage d’énergie.

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Le conflit peut-il cesser sans l’intervention de la volonté ?

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Ce qui se produit, en général, lorsqu’on a un problème, c’est qu’on y pense, on le tiraille, comme un chien le ferait de son os, on s’en empare, on le met en pièces, on l’examine sous différents angles, et à la fin de la journée on est las et l’on va se coucher, épuisé par cette lutte. Lorsqu’on s’endort enfin, l’esprit conscient se détend, parce qu’on a tant réfléchi à ce problème qu’on ne peut plus penser. Étant détendu, on se réveille le matin et on a la réponse.

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Notre demande centrale est donc de voir s’il est possible de mettre fin au conflit dans tous nos rapports – à la maison, au bureau, dans tous les domaines de notre vie – d’en finir avec le conflit. Sans nous replier dans l’isolement, nous faire moine, ou nous retirer dans quelque recoin de notre imagination ou de nos fantasmes; cela signifie comprendre le conflit tout en vivant dans ce monde. Car, tant que subsiste un conflit quelconque, il est évident que nos esprits, nos cœurs, nos cerveaux ne peuvent fonctionner à pleine capacité. Ils le peuvent seulement quand n’existe aucune friction, et dans la clarté. Et la clarté n’est là que lorsque l’esprit dans son entier – l’organisme physique, les cellules cérébrales et la totalité de ce qu’on appelle l’esprit – est en état de non conflit, quand il fonctionne sans aucune friction; ce n’est qu’alors que la paix peut exister.

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Le vrai révolutionnaire est, pour lui, l’homme qui aime. C’est aussi le religieux dans le vrai sens du mot. Cette religion n’est fondée ni sur la pensée, ni sur les croyances et les dogmes : « L’amour ne peut être connu que lorsque le sens du devenir, qui crée les opposés, cesse. Si l’on n’intègre pas la pensée, le sentiment et l’action, on cesse d’être intelligent. On ne fait que vivre dans des compartiments. Et une vie compartimentée est en réalité destructrice. »

Jiddu Krishnamurti dans Mettre fin au conflit

Une pièce musicale de Max Richter – On The Nature Of Daylight (Entropy)