Deux rabbins sont à l’arrière d’un taxi à New York.
L’un dit à l’autre : » Je suis petit et médiocre. Je suis inexistant. «
L’autre renchérit : » Quant à moi, je suis poussière de poussière, fumée inconsistante, informe et ridicule. » Le chauffeur de taxi se retourne vers eux et s’exclame : «
Mais enfin, Messieurs les grands rabbins, si avec votre sagesse, vous êtes poussière et fumée, alors moi, je suis un néant de néant, un déchet minable, un résidu … »
Les deux sages se tournent immédiatement l’un vers l’autre et disent : » Non mais, pour qui se prend-il celui-là ?
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Tout ce que nous construisons solidement finit par s’user ou par disparaître, tandis que ce qui est fragile, éphémère et faillible, laisse paradoxalement des traces indélébiles dans le monde. La buée des existences passées ne s’évapore pas : elle souffle dans nos vies et nous mène là où nous ne pensions jamais aller.
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En français comme dans la plupart des langues, il n’existe aucun mot pour désigner celle ou celui qui perd un enfant. Perdre un parent fait de vous un orphelin, et perdre un conjoint fait de vous un veuf. Mais qu’est-on lorsqu’un enfant disparaît?
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En hébreu, en revanche, ce mot existe. Un parent qui perd un enfant est appelé « Shakoul », un terme preque impossible à traduire. Il est emprunté au registre végétal et signifie la branche de la vigne dont on a vendangé le fruit. Un parent endeuillé est raconté en hébreu par une image, celle d’une branche amputée de ses grains, ou d’une grappe dont on a arraché le fruit. La sève coule en elle mais n’a plus où aller, et le bourgeon s’assèche car un bout de sa vie l’a quitté.
Delphine Horvilleur dans Vivre avec nos morts
Une pièce musicale de Kayah – Hava Nagila
Les paroles en français sur https://greatsong.net/TRADUCTION-RIKA-ZARAI,HAVA-NAGUILA,199428.html
Un beau défi, et qui sait on peut se surprendre à sortir des cadres
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Vrai il faudrait l inventer ce mot qui désignerait l ‘indicible.
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