Un chemin de vie

Avant de pouvoir symboliser, il nous appartient de reconnaître ce qui a été touché, blessé en nous au travers des paroles ou du comportement d’autrui. Nos émotions ont un sens, elles parlent de ce qui résonne en nous autour d’un événement, d’une rencontre ou d’une blessure ancienne, d’une situation inachevée, d’une perte. C’est ce qui permet de comprendre que les frustrations émotionnelles surgissent brutalement et nous traversent à la vitesse de l’éclair. Elles implosent avant de se manifester à l’extérieur. Elles nous laissent démunis, désorganisés et nous plongent le plus souvent dans un chaos où la raison n’a plus sa place. C’est dans ces moments-là que nous sommes le plus réactionnels, parfois le plus injustes, et que nous risquons de prendre des décisions qui se révéleront plus tard totalement inadéquates ou peu cohérentes avec la situation ou avec ce que l’autre est en droit d’attendre de nous.

Identifier ce qui a été touché en soi, conscientiser l’origine de sa blessure relève d’un travail d’écoute de soi, un travail d’exploration de soi-même et de son histoire. Cette écoute n’est possible que si on renonce à accuser ou à mettre en cause l’autre, que si on lâche le ressentiment lié au préjudice ou à l’humiliation qui nous ont été imposés.

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Beaucoup de gens pensent qu’il suffit de prendre conscience d’un problème, de l’exprimer, d’écrire une lettre imaginaire ou de transférer ses sentiments (négatifs ou positifs) sur un thérapeute, pour réparer une injustice, calmer des conflits ou apaiser des ressentiments… D’autres invoquent la nécessité et les bienfaits du pardon. Le pardon jouit de fait d’une image positive. Certes, il diminue considérablement les ruminations et atténue le comportement défensif chez celui qui le donne ou le propose. Mais le problème, c’est qu’il déculpabilise surtout le violent, et laisse la violence chez celui qui l’a reçue.

Le pardon dans beaucoup de cas risque d’être un leurre et parfois même une escroquerie à l’égard de soi-même, pour celui qui le donne. Il est possible que, pour beaucoup de personnes, cela aille à l’encontre de leurs croyances bien ancrées sur ses bienfaits. Dans les concepts de communication sur lesquels on s’appuie, il n’est proposé ni pardon ni vengeance, mais un positionnement de soi plus clair, en remettant chez autrui ce qui n’est pas bon pour soi-même.

Jacques Salomé dans Un chemin de vie

Une pièce musicale de Mozart’s Turkish March in Bamboo

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