Cheng et la joie

En chacun de nous, chaque éveil est un recommencement du monde, source d’une joie inépuisable.

*

En ce changement du temps cyclique, formulons le souhait que chaque jour qui se donne soit l’occasion pour chacun de renaître à la vraie vie.

*

Car, si la joie résulte d’un processus plus ou moins long, sa manifestation est fulgurante : elle se produit toujours dans l’instant, un instant chargé d’inattendu et de désespéré.

*

Ni contentement ni satisfaction, différente de l’euphorie ou même de la jubilation, la joie véritable n’est pas de l’ordre de l’avoir assoiffé, elle est transfiguration de l’être.

*

Celui qui sait accueillir la joie se sera donc rendu humble, il se sera dépouillé de ses oripeaux, allant, au besoin, jusqu’à une mort à lui-même. Il ne manquera pas de s’apercevoir que la joie n’est pas réservée aux seules circonstances exceptionnelles, mais que la vie quotidienne est remplie de ces signes, pourvu qu’on sache les déchiffrer : un rayon de soleil qui s’attarde sur un vieil ustensile, un sourire accordé au milieu des grisailles. Il n’est pas jusqu’à la fleur anonyme perçant le bitume qui ne puisse le convaincre du miracle qu’est l’avènement de la vie.

*

La joie que nous avons en vue ne tire sa dépendance d’aucun objet extérieur. Durable et parfaite, elle arrache l’homme aux contingences, le hisse au-dessus de lui et ouvre devant lui la voie qui mène à la vraie vie.

*

Car la joie, si elle a sa raison d’être, se doit d’être un hymne à la vie.

François Cheng dans La joie, en écho à une œuvre de Kim En Joong

Une pièce musicale de Johannes Bornlöf – Reminiscence