Les chats de Paris

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Tous les chats de Paris sont sur les toits de Paris. Il y a là le chat blanc de la crémière, bas sur pattes, ocré, rond, ronron, la langue épaisse, gourmand de lait et de crémières.

Il y a le chat de Madame Durand, ocellé, roué, tout écrit comme un journal, pareil à un petit zèbre de l’air.

Et le minet de la bonne, au cinquième, lâche et chaud dans son pelage bleu-blanc-rouge. Sur les toits des Champs-Élysées sont les beaux chats de la bourgeoisie, les grands angoras joufflus, pleins de principes et de lois, la rosette au poitrail, avec leurs moustaches de gendarme et leurs fourrures de chez Paquin.

Plus loin, voici les chats du Champ-de -Mars, la queue en trompette, la tête en forme de képi, guerriers d’appartements en service au poste de T.S.F. Et puis les chats du XVè, les chats des petites toitures de fortune, en manches de chemise, en caleçon, lestes, faméliques, poivrots de lune.

Et les matous du Bois, silencieux, confortables, épris de fortunes et de bonnes fortunes, les Rolls-Royce des chats.

Et les chats de Montmartre et des Batignolles, chats des bistrots et des cours à linge, aigus, inverses, maigres de vices, luisants de coco, la queue à l’envers.

Et les chats du Boulevard de la Chapelle, en casquette à carreaux, juchés sur les piles du Métro.

Et les chats d’Italie, pauvres chats de misère noire, frères cadets des rats, nourris de miettes et de coups de pieds.

Et les chats du Luxembourg, chats étudiants, blanchis sous le harnais, chats sorbonniques, chats parchemin…

Joseph Delteil dans Les chats de Paris

Une chanson de Daniel Lavoie – Chats de Paris