
La philosophie est un art du toucher comme le sexe est un art de l’intelligence. Le toucher est l’expérience vivante du monde de ce qui en nous « pense la pensée ». La philosophie est un art du toucher parce qu’elle éprouve ce qu’elle pense, parce qu’elle n’apparaît précisément que dans et par cet acte, tandis que le sexe, lui, nous fait faire l’expérience précisément de ce qu’il y a d’intouchable dans l’autre. Cet autre que l’on peut explorer, retenir, envelopper, consoler, meurtrir, faire jouir dévoile dans l’intimité la plus crue, la plus exposée qu’une part échappera toujours non seulement au désir mais au sexe même (mot qui dit aussi bien les organes que l’acte sexuel), et qu’il y a de l’intouchable dans le corps lui-même. Là était le génie de Spinoza : la transcendance au plus près de soi, et tu ne le sais pas. Personne ne sait ce que peut un corps. Le corps est au creux du désir, de la parole, de la pensée, son exacte résonance, sa matière, son histoire
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L’émotion est absolument involontaire, elle est un pur événement intérieur, elle arrive, c’est tout, vous surprend, vous désarme, insiste et bouleverse l’ordre des pensées comme tout autre ordre d’ailleurs.
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La philosophie use de concepts comme autant de petits barreaux de bois magique pour construire une échelle éternelle. Et pour atteindre quoi ? les vérités célestes ? non, le désir.
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C’est la même force qui pousse un homme, une femme à aimer et à penser.
Anne Dufourmantelle dans Blind date
Une pièce musicale de André Gagnon – Pensées fugitives
André Gagnon – Premier regard